Trente ans après sa tragique disparition, Ayrton Senna, l’enfant de São Paulo, est célébré par un livre et une bande dessinée

Publiés par les Éditions Glénat, le livre Eternel Senna : Le livre hommage et la bande dessinée Ayrton Senna : Histoires d’un mythe parcourent l’incroyable ascension, les nombreux Grand Prix et la fin tragique de l’un des plus grands pilotes de l’histoire de la Formule 1, désormais déifié au Brésil.

Tout le monde se souvient, y compris les moins férus ou les amateurs dilettantes de Formule 1, de ce dimanche 1er mai 1994 alors que le Brésilien Ayrton Senna décédait, à l’âge de trente-quatre ans, des suites de ses blessures lors d’un accident spectaculaire au Grand Prix d’Imola, dans la région métropolitaine de Bologne, en Italie. La mort de l’étoile montante de la F1 qui portait haut les couleurs du drapeau brésilien survient alors que l’univers de la F1 est déjà endeuillé après la disparition, le samedi 30 avril, du pilote autrichien Roland Ratzenberger. Dès la date fatidique du 1er mai, les édifices de São Paulo se parent de grandes affiches, de drapeaux et même de graffitis à l’effigie de leur idole prématurément disparue. Même le célèbre stade Cícero Pompeu de Toledo, populairement connu sous le nom de Estádio do Morumbi ou tout simplement Morumbi, se pare du portrait d’Ayrton Senna. Tout un pays est en deuil et en oublie sa religion principal, le football, pour rendre un vibrant hommage à l’enfant du pays.

Hommages au Brésil et à travers le monde

Trente ans plus tard, les souvenirs sont toujours aussi vivaces, que se soit son impressionnante carrière que sa terrible disparition.
Déjà légende de son vivant, Ayrton Senna est vénéré comme un dieu sur l’autel des grands noms du sport brésilien tout comme Edson Arantes do Nascimento, dit Pelé. Trente ans après sa mort, le coureur automobile est toujours présent dans le cœur des Brésilien.ne.s. Son terrible accident a engendré un renforcement de la sécurité en Formule 1, une prise de conscience que confirmait le journaliste spécialisé britannique Maurice Hamilton dans le documentaire de Paul Crowder, intitulé Life on the Limit (Quand les pilotes jouent avec la mort), sorti en 2013 et consacré à la sécurité dans le sport automobile.

Trois fois champion du monde, connu pour son sixième sens mais surtout son exceptionnelle endurance au travail, Ayrton Senna pouvait sentir et voir des choses que les autres ne pouvaient pas. Aussi savait-il parfaitement anticiper sur les circuits. Une longue enquête avait permis d’établir que l’accident avait été provoqué par la rupture de la colonne de direction de sa Williams et qu’une roue était venue heurter son casque, alors qu’un bras de suspension perforait l’habitacle lorsque la monoplace s’était fracassée contre un mur en béton, dans le virage de Tamburello.

Avec trois titres de champion du monde (1988, 1990 et 1991), 41 victoires et 65 pole positions en 161 Grand Prix, Ayrton Senna a bâti l’un des plus beaux palmarès de la F1, avec Lewis Hamilton, Juan-Manuel Fangio, Michael Schumacher, Sebastian Vettel ainsi qu’Alain Prost qui reste étroitement lié au destin de Senna : les deux hommes ont été coéquipiers et leur rivalité demeure notoirement connue pour être la plus farouche de l’histoire de la F1. Trente ans après le fatidique accident sur le circuit d’Imola, le mythe Senna demeure intact et nourrit l’admiration de tout un pays. Parmi les hommages rendus à Senna figurent un livre et une bande dessinée.

Eternel Senna : le livre hommage

Les auteurs Daniel Ortelli et Thomas Woloch dont les textes sont accompagnés par de magnifiques photographies signées Dominique Leroy, photographe de F1 et témoin privilégié de la carrière d’Ayrton Senna, permettent de se replonger dans cette époustouflante carrière tout en rencontrant l’homme derrière le pilote, à travers des témoignages et des histoires inédites qui permettent de cerne la personnalité du jeune pilote dans une ample palette de nuances.

Si l’ouvrage rappelle combien Ayrton Senna reste l’un des plus grands pilotes de l’histoire de la Formule 1 et combien il fascine bien après son décès survenu, Daniel Ortelli, Thomas Woloch et le photographe Dominique Leroy ont choisi de se pencher sur l’histoire du Brésilien depuis ses débuts en Formule 1 en 1984 jusqu’à sa dernière saison chez Williams dix ans plus tard.

En 224 pages richement illustrées et sur papier glacé, et à travers des témoignages exclusifs de ceux qui ont connu le coureur automobile brésilien au plus près, les auteurs proposent un portrait remarquablement humain de ce pilote devenu légende du sport automobile. Le livre révèle son caractère, ses points forts, ses faiblesses, ses moments de joie ou de doutes, diverses facettes de sa personnalité et nombre d’éléments de la carrière de celui que l’on appelait « Beco » ou « Magic », sont abordés dans cet ouvrage captivant qui abonde en histoires et d’anecdotes inédites.

Évidemment, d’aucuns argueront que beaucoup de livres ont déjà été faits sur le mythique pilote brésilien. On peut alors se questionner comment faire mieux vu tout ce qui précède. C’est bel et bien le cas avec cet ouvrage qui présente de nombreuses photographies inédites ou que peu exploitées, sans oublier des témoignages insoupçonnés.

Une bande dessinée – Ayrton Senna : historie d’un mythe

Publiée chez Glénat, Ayrton Senna : histoires d’un mythe figure dans la collection consacrée à l’univers automobile, Plein Gaz qui met à l’honneur les belles mécaniques et les grandes heures de la course automobile : biographies dessinées de grandes personnalités du monde automobile, récits historiques et sportifs des moments de compétition les plus emblématiques ou encore pures fictions.

À l’instar du livre, la bande dessinée retrace la trajectoire du pilote de légende depuis ses débuts quand, lors du Grand Prix de Monaco en 1984, un jeune pilote fait sensation et entre dans l’histoire de la F1. Alors que la principauté est sous le déluge et que la plupart des pilotes sont mis en déroute, celui-ci livre une prestation impressionnante, rattrapant progressivement le champion Alain Prost. La course sera finalement écourtée et Prost obtiendra la première place, mais le nom d’Ayrton Senna restera. Le Brésilien remporte plus tard ses plus grandes courses sous la pluie (Estoril 1985, Interlagos 1991, dans les environs de São Paulo, ou encore Suzuka 1993), fruit d’un entraînement intensif dans sa jeunesse sous ces conditions.

 

Trente ans après sa mort, la collection Plein Gaz s’attaque donc enfin au destin du mythique Ayrton Senna. L’album, construit en différents chapitres éclairant les moments importants de la vie du champion – sa jeunesse au Brésil, son entrée chez Lotus, mais aussi sa fin tragique -, bénéficie du scénario signé Lionel Froissart, mis en valeur par les dessins des Belges Robert Paquet et Christian Papazoglakis.

Le journaliste spécialisé en sports automobiles Lionel Froissart a fait ses débuts à Auto-Hebdo en septembre 1976, où il crée la rubrique « karting ». Parallèlement, il suit quelques Grands Prix de Formule 1 comme photographe jusqu’en 1984. Il fait la connaissance d’Ayrton Senna en septembre 1978 et suivra toute sa carrière jusqu’au fatal 1er mai 1994. Les dessinateurs belges Robert Paquet et Christian Papazoglakis ont associé avec brio leurs talents pour cet album. En 56 pages, cette bande dessinée illustre tous les grands moments de la carrière du pilote de ses débuts flamboyants en carting et en Formule 3 jusqu’à l’issue fatale de ses dix ans de carrière en F1. Entre l’évocation des courses et des moments les plus emblématiques du pilote, Lionel Froissart nous montre l’homme en proie à des doutes. Personnage hors du commun, Senna avait peu confiance en lui et demeurait très sensible aux traitements injustes dont il fut la cible lors de certaines courses et oppositions face à Prost. Cette inimitié se fit grandissante et alimenta une redoutable guerre des circuits entre les deux célèbres pilotes du début des années nonante. Cette bande dessinée, savamment élaborée, sait éviter avec justesse tout manichéisme malencontreux, toute hagiographie exacerbée ou toute idolâtrie intempestive.

Le Bruxellois Christian Papazoglakis termine ses études en bande dessinée à l’École supérieure des arts de Saint-Luc à Liège, où il a été l’élève de Jean-Yves Stanicel. Il poursuit son apprentissage avec Chris Lamquet sur Adeleen & Dobs. Il crée le groupe pluridisciplinaire Artzoo Graphic. Il prend part au collectif indépendant Hécatombes et participe à des albums collectifs auto-produits dans les années 90. Il y rencontre Nikola Witko qui scénarise Les Bijoux de famille et Slots (Requins Marteaux 2000 et 2001). Plus tard, il collaborera avec lui sur certains décors des BD Apollo 13, Alvin Norge et réalise également quelques sommaires pour le journal Spirou.

En 2003, il rejoint le studio Graton et participe à la réalisation d’une quinzaine d’albums sur et autour du personnage Michel Vaillant pour Graton Editeur, qui publie également un roman graphique: La Station Indienne (Col. Essai Libre 2007). En 2009 sort le premier tome personnel de 317ème EAST chez Joker. C’est au Studio Graton qu’il rencontre Robert Paquet et Nedzad Kamenica avec qui il fonde, en 2010, le Studio PaKap. Ils réalisent depuis 2010 des illustrations et bandes dessinées dans différents domaines, et retracent, sur les scénarios de Denis Bernard, Youssef Daoudi et Lionel Froissart, les grands moments de la course automobile pour la collection Plein Gaz (Chapman, Alpine, Ayrton Senna, Sebring 70, Les 24 Heures du Mans).

Firouz E. Pillet

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