Avec la mini-série En haute mer, Denis Rabaglia plonge le public dans une enquête policière en milieu maritime. Rencontre
Le cinéaste valaisan d’origine italienne a adapté le roman En eau salée, de Fabien Feissli, et signe quatre épisodes de 42 minutes. Pour l’adaptation du roman, Denis Rabaglia, qui signe aussi le scénario, s’est entouré des talents de divers scénaristes : Stéphane Mitchell, Joseph Incardona, Ami Cohen, Fred Castadot, Grégory Lecoq et Charlotte Joulia.
Entraînant spectatrices et spectateurs dans l’univers méconnu de la marine marchande helvétique, Denis Rabaglia suit l’enquête d’Aurélie Mercier (Maud Wyler), une inspectrice qui a laissé maladroitement filer Florian (Maël Cordier), un jeune homme soupçonné d’être impliqué dans la disparition de sa petite amie Julia. En effet, Julia (Isaline Prévost Radeff), ne donne plus de signes de vie depuis qu’elle a embarqué sur un mystérieux cargo. Pourtant, avant que son compagnon, Florian, n’échappe à l’enquêtrice, il se faisait un sang d’encre pour elle et, grâce à un escamotage, avait réussi à se faire embaucher afin d’enquêter pour découvrir où elle se trouvait et, surtout, pour savoir ce qui s’était passé sur ce mystérieux cargo. Mais soudain, tout s’emballe quand l’enquêtrice apprend qu’il a été arrêté sur un cargo de la marine marchande suisse pour le meurtre d’un matelot. Envoyée en Afrique du Sud pour le rapatrier, Aurélie Mercier découvre que Julia a été passagère de ce cargo quelques semaines auparavant. Elle poursuit son enquête, seule, et fait face à la résistance de l’équipage et de son capitaine (Michael Neuenschwander), de prime abord si conciliant.
L’inspectrice, qui travaille au sein de la police de Genève, doit rapatrier le jeune homme, à qui elle a eu à faire par le passé. Elle est convaincue que le capitaine et son équipage cachent quelque chose et que la disparition de Julia est en rapport avec ces secrets psychologiques savamment entretenus. Denis Rabaglia voulait filmer à bord d’un véritable cargo et il y est parvenu mais ce n’était pas gagné d’avance. Enthousiaste à l’idée d’adapter librement ce polar en quasi-huis clos, au cœur de la marine marchande, ce qui peut paraître, a priori, paradoxal, pour la Suisse, le cinéaste y a vu un décor incroyable et propice qui devient devant sa caméra un territoire cinématographique palpitant. Au fil des scènes, la tension monte progressivement à mesure que le fantôme de Julia qui plane sur le cargo redéfinit les enjeux de l’enquête.
Avec l’accord de l’auteur du roman, le cinéaste en a conservé l’esprit mais a pris quelques libertés afin de pouvoir écrire une histoire sur quatre épisodes ; il a donc pris d’autres personnages, a renversé quelques situations et a commencé par le milieu du roman tout en respectant l’atmosphère et les rapports entre les personnages dans cet environnement très particulier et très masculin que l’on découvre du poste de commandement jusqu’aux cales en passant par les divers ponts.
S’inscrivant dans la lignée des polars suisses, à commencer par Friedrich Dürrenmatt – on songe à Das Versprechen (La promesse, 1958) – et le mouvement contemporain du polar romand, Denis Rabaglia tient le public en haleine, dans un judicieux mouvement de balancier entre polar pur et thriller psychologique, suggérant des pistes, chamboulant les certitudes et distillant subtilement quelques manipulations mentales, inquiétudes et tensions pour alimenter le suspens. L’atmosphère de En haute mer est oppressante, étouffante, et par moments anxiogène, construisant une histoire où s’enchaînent des rebondissements sans fin.
Les épisodes de En haute mer ont été diffusées par deux, respectivement le 21 et le 28 novembre 2024 et sont à voir, en tout temps, sur Play RTS.
Alors qu’il peaufinait le montage des derniers épisodes, Denis Rabaglia nous a parlé, par téléphone, de son expérience sur cette mini-série. Entretien:
Firouz E. Pillet
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