« Échec et veuf », de et par Claude-Inga Barbey et Patrick Lapp / Bergamote, dissertent sur les joies, les disputes et la tendresse du couple. Rencontre
La Scène Vagabonde Festival, placé sous la houlette de Valentin Rossier, a ouvert le programme des festivités de l’édition 2024 en conviant deux monstres du répertoire du théâtre romand : Claude-Inga Barbey et Patrick Lapp qui forme le couple le plus célèbre de Bergamote, Monique et Roger.
Après avoir convié durant plusieurs années le public dans le Parc Trembley, le festival a établi ses pénates dans la salle Caecilia, la salle paroissiale de l’Église Saint-Antoine de Padoue, dans le quartier de la Servette. C’est dans ce lieu accueillant que le tandem, qui a marqué des générations par le biais de la radio et du théâtre, retrouve le public pour disserter sur les joies et de l’enfer conjugal, avec sa kyrielle d’agacements, de reproches, mais aussi de rires et de tendresse.
Car, après quarante ans de mariage (sur scène) et malgré l’usure du temps qui s’écoule inéluctablement, la tendresse demeure et reste inaltérée, intacte comme au premier jour. Un premier jour, une première rencontre que le couple scénique nous a partagé depuis le début de leur histoire que l’on suit sur quatre décennies. Monique et Roger, nous les connaissons bien et nous avons partagé leur amour, leurs doutes, leurs crises et leur tendresse. Monique et Roger, c’est vous, c’est nous ! Dans un facétieux jeu de miroir, le public se reconnaît dans leur histoire.
Avec le regard complice et la mise en musique de Claude Blanc, Échec et veuf poursuit dans la lancée de Bergamote, disséminant son essence au fil des spectacles qui nous ont permis d’accompagner et d’évoluer aux côtés de ce couple théâtral mythique. L’union que forment Roger et Monique a su intelligemment évoluer avec l’âge de ses deux protagonistes principaux, Patrick Lapp et Claude-Inga Barbey. Le public romand a connu la fougue de leur rencontre, les émois des premiers temps ensemble, l’arrivée des enfants puis l’angoisse du nid vide au départ de chaque enfant. Le public a vieilli avec les deux comédiens en s’identifiant à eux deux et, par la force des circonstances et de la vie, continue à le faire.
Après Noce de carton qui célébrait l’angoisse du nid vide lorsque les enfants quittent la maison parentale puis Thé dansant qui symbolisait le début du « silver » âge, avec l’arrivée des petits-enfants et un changement de statut irréversible dans la constellation familiale, ce nouvel opus, qui s’ouvre sur Roger jouant aux échecs alors que Monique lit – la passion respective de chacun.e des comédien.nes -, permet à notre couple scénique de faire le bilan du chemin parcouru, et, au passage, de se faire encore quelques reproches mais aussi d’apprécier tout ce que l’autre a su et pu nous apporter … Bref, de s’exprimer sa tendresse, le tout saupoudré d’échos à l’actualité.
Avant une représentation, Claude-Inga Barbey nous a parlé de ce spectacle, de sa complicité avec Patrick Lapp, du bien-fondé des salles de théâtre de quartier, de la situation des humoristes dans la société actuelle, de la liberté d’expression, de la chasse aux sorcières qu’elle a vécue suite aux assauts des « snippers » des réseaux sociaux … Mais aussi de ses projets dont la Revue genevoise ! Rencontre.
Firouz E. Pillet
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