Poly, adaptation du feuilleton par Nicolas Vanier, suit les aventures entre une fillette et un poney maltraité – sortie sur les écrans romands le 7 octobre
Cécile, dix ans, déménage dans le sud de la France, à Beaucastel, avec sa mère, Louise (Julie Gayet). Ce sont les grandes vacances mais l’intégration avec les autres enfants du village est ardue, d’autant plus que le fils du boucher fait la loi et dirige le clan des petits villageois, leur interdisant de fréquenter « la Parisienne ». Lorsqu’un cirque de passage s’installe à côté, Cécile découvre que Poly, le poney vedette, est maltraité. Elle décide de le protéger et d’organiser son évasion ! Poursuivis par Brancalou (Patrick Timsit), l’inquiétant directeur du cirque, et le mystérieux Victor (François Cluzet), châtelain ruiné après l’incendie de son château et repris de justice, accusé à tort. Cécile et Poly s’embarquent dans une cavale pleine de rebondissements, un véritable voyage initiatique et une incroyable histoire d’amitié au jouer de la Provence, dans les champs habités par le chant des cigales.
Poly est l’adaptation, très libre, du feuilleton intitulé Les aventures de Poly, diffusé en 1961. Avec Poly, le réalisateur Nicolas Vanier retrouve l’univers de l’auteur Cécile Aubry après Belle et Sébastien (2013). Il collabore aussi à nouveau avec François Cluzet après L’Ecole buissonière (2017).
Dans le feuilleton original, le héros est un jeune garçon. Pour cette adaptation, le cinéaste a décidé de confier le rôle principal de Poly à une jeune héroïne prénommée Cécile, en hommage à l’auteur Cécile Aubry, décédée en 2010. Pour trouver sa Cécile, Nicolas Vanier a auditionné plusieurs milliers de jeunes filles et a choisi Elisa de Lambert qui s’est imposée pour son vrai talent d’actrice et sa capacité à pouvoir supporter de lourdes conditions de tournage. Suivant des cours de théâtre depuis plusieurs années, Elisa de Lambert avait vraiment envie de tourner un film depuis qu’elle a vu Edmond au cinéma, et encore plus avec des animaux. Il est connu que tourner avec des enfants est difficile tout comme avec des animaux. Ici Nicolas Vanier relève ce double défi avec brio.
L’aventurier, écrivain et cinéaste Nicolas Vanier poursuit avec l’adaptation de Poly son exploration de la relation entre l’homme et le monde animal. Dès la séquence d’ouverture, la caméra de Nicolas Vanier suit la décapotable turquoise conduite par la mère de famille, fraîchement divorcée, ce qui posera quelques problèmes d’acceptation et quelques commérages. Le film se situe dans les années soixante et certaines réalités de l’époque surprendront le jeune public actuel. Le film fait la part belle à un discours humaniste et à la défense des animaux, ce qui devrait être une attitude iconoclaste et courageuse dans les années soixante. En effet, la jeune mère de famille divorcé, Louise, s’installe comme infirmière mais sa première patiente, la femme du boucher, lui confie qu’elle n’a le droit de ne rien faire sans l’aval de son mari et qu’elle ne sait pas conduire. Louise, femme moderne, indépendante, va y remédier et lui donner des cours de conduite.
Autre réalité de l’époque : ni les enfants ni les animaux n’ont des droits. Un jeune garçon qui nettoie les cages des animaux du cirque, Pablo (Orian Castelano) subit les violences de son père tout comme Poly dont le pelage est couvert de blessures. Dans ce décors lumineux et accueillant du Sud de la France, la jeune Cécile semble animée de sentiments précurseurs et bienvenus en décidant de sauver le poney maltraité, initialement envers et contre tous, mais avec le soutien du jeune Pablo. Un élan de soutien salutaires des enfants du village qui décident de lui venir en aide lui permettra de fuir avec Poly, une échappée belle semée d’embûches, dont on se doute qu’elle finira par des retrouvailles et des embrassades.
En filigrane, on perçoit quelques critiques subtiles quant aux adultes trop occupés à vivre leur vie moderne – Louise qui passe ses journées au cabinet, laissant Cécile seule dans sa chambre; des policiers stupides qui sont non sans rappeler ceux de Saint-Tropez; un boucher qui ne voit pas où est le problème de manger des animaux.
Nicolas Vanier a su s’entourer d’acteurs expérimentés qui accomplissent leurs tâches à la perfection. François Cluzet, en motard, veuf bougon reclus dans son château, Julie Gayet, en mère divorcée optimiste, Patrick Timsit, gitan chevelu en propriétaire de cirque voyou et gouailleur.
Les éléments des années soixante sont remarquablement reconstituées – tenues vestimentaires, en particulier des femmes; voitures, etc. D’ailleurs, le langage est bien éloigné de celui que s’échangent, de nos jours, les pré-adolescents et adolescents. A un moment du film, Cécile a embarqué avec Poly sur un radeau et descend la rivière mais le duo est rattrapé par Brancalou. Devant les menaces de ce dernier, Cécile se met à jurer avec des insultes des années soixante – pour ce faire, la jeune comédienne a fait des recherches avant tourner cette scène et au moment du tournage, elle a osé les servir, ce qui a plus à Nicolas Vanier.
Les jeunes enfants jusqu’à dix ans (en effet, une pré-adolescente de dix ans dans les années soixante n’a rien à voir avec ses congénères actuelles !) aurons un plaisir fou à suivre cette épopée d’un tandem qui se rencontre dans sa solitude. Le film se laisse savourer tel un bonbon acidulé qui explose en bouche ! Un plaisir partagé pour le jeune public et les parents qui doivent connaître le feuilleton d’orgine.
Firouz E. Pillet
© j:mag Tous droits réservés