Rentrée littéraire: Crans-Montana, le coup de cœur d’Anne-Sophie Bruttmann
La fin de l’été approche, avec elle la particularité culturelle française de l’automne – la rentrée littéraire. Parmi les quelques 589 romans prêts pour la course aux nombreux prix qui ponctueront les deux dernières saisons de cette année 2015, Crans-Montana de Monica Sabolo, le coup de cœur d’Anne-Sophie Bruttmann – historienne de l’art et chargée de communication à France 5.
MaB
Crans-Montana. Un désert, un nouvel état ?
C’est un mot posté régulièrement par elle sur les réseaux sociaux, accompagné de photos, qui m’a fait me poser la question.
Crans-Montana, c’est en Suisse. Je n’en ai jamais entendu parler. C’est un lieu célèbre des années 60-70 où insouciance et argent allaient de pair.
Elle, c’est Monica Sabolo, écrivain, ex-journaliste, que j’ai découverte par hasard – car je ne lis pas d’auteurs français d’aujourd’hui – avec son livre Tout cela n’a rien à voir avec moi que j’ai adoré, étrange livre-objet fragile comme un Francesca Woodman.
Savoir qui est Monica importe peu. Elle se défend de parler de ses propres souvenirs. Elle dit qu’elle invente. Sa plume est langoureuse et pique parfois. Bien sûr elle n’invente pas. Les douleurs de cette jeunesse huppée est vécue et la mère, présente déjà dans le précédent livre, imprègne encore de son insolence de nombreux passages du nouveau livre. Elle cherche un père à sa fille, et l’amant français comme l’amant chinois balance fric et diamants.
Ce livre a trois héroïnes. La beauté est partagée entre elles, les secrets, les soirées. On n’y entend pas Blue Moon mais sans doute du disco. Qu’est-ce qui tient lieu de Campari comme dans Les petits chevaux de Tarquinia ? Je l’ignore. Résumer l’histoire n’est pas mon propos. Monica me parle, à moi, comme autrefois Marguerite Duras m’a parlé. Quand je la lis, je deviens une oreille, un cœur, une perception. Ses mots me sont immédiatement donnés, la lire tient du bonheur et de la souffrance, comme disait Truffaut.
Monica c’est une découverte, un mirage, un fil tendu. Elle parle d’amour avec une fausse légèreté qui est sans doute une tragédie. Monica et ses mots sont des photos de Todd Hido, de Stephen Shore, tout en douleur rentrée. Le temps passe sur la vie insensible, sur le mystère qui plane dans ces lieux qui comme un Saïgon rêvé, pourraient tout aussi bien ne pas exister.
Anne-Sophie Bruttmann, Paris
Crans-Montana de Monica Sabolo – Éditions Jean-Claude Lattès, disponible en format papier et numérique.
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