The Gray Man – Une chasse à l’homme autour du monde
Le dernier film des Frères Russo (deux Captain America : The Winter Soldier et Civil War, deux Avengers : End Game et Infinity War) aurait coûté dans les 200 millions de dollars… et ça se voit. Pendant deux heures, nous suivons Six (Ryan Gosling), surnommée aussi « Gray Man », tueur au service de la CIA, dans tous les (re)coins du monde, sur un mode effréné, ponctué par une foultitude de démonstrations technologiques, de courses-poursuites (à pied, en voiture, en avion, dans les airs en chute libre, en tram…), de combats martiaux, à l’arme blanche et surtout aux armes en tous genres, provoquant explosions, fusillades, et même la destruction quasi complète du centre-ville de Prague ! Un feu d’artifices de tout ce que le genre propose.
L’histoire, qui n’a pas beaucoup d’importance, met en scène une agence de la CIA totalement vérolée de l’intérieur, avec une agence dans l’agence qui opère hors tout cadre légal dans différentes parties du monde à ses propres fins. Ses tueurs à gage, choisis parmi des repris de justice, obéissent aux ordres dans se poser de questions. Six, à qui on a ordonné d’éliminer un de ses « collègues » va recevoir un petit objet dont le contenu dévoile les basses œuvres de l’agence. Le chef du groupe opérationnel de la CIA (Regé-Jean Page) envoie à ses trousses un sociopathe (Chris Evans) qui organise une chasse à l’homme mondiale. Seul contre toutes et tous, Six va finir par être épaulé par une agente active dans la CIA (Anа de Armаs) qui cherche à sauver sa carrière.
Il y a bien sûr des traumatismes, des drames personnels qui jalonnent cette bruyante chevauchée, mais rien que nous n’ayons déjà vu mille fois – y compris, l’effluve conspirationniste qui embaume ces deux heures. Les personnages vivent dans la zone grise de leur métier, mais ont, finalement, chacun.e une seule dimension : celle de représenter le bien ou le mal. On ne divulgâchera pas grand-chose en disant que Six, malgré sa condamnation à perpétuité ainsi que les tombereaux de mort.es qu’il laisse dans son sillage, est, au fond, un bon gars…
La seule chose vraiment intéressante est la discrépance à nouveau démontrée entre la fascination étasunienne pour l’idée qu’un individu est capable de se battre seul contre le mal – et de vaincre – et la réalité des réflexes lorsqu’un Snowden, un Assange ou une Chelsea Manning se met sur la route de leurs institutions sacralisées et devient traître à la patrie. Au milieu du bruit et de la fureur qui ne mobilise pas beaucoup de cerveau disponible, vous avez deux heures pour disserter en aparté avec vous-mêmes sur cette curiosité.
D’Anthony Russo et Joe Russo ; avec Ana de Armas, Ryan Gosling, Chris Evans, Jessica Henwick, Regé-Jean Page, Wagner Moura, Billy Bob Thornton, Julia Butters, Alfre Woodard, Dhanush ; États-Unis ; 2022 ; 122 minutes.
Sur les écrans suisses.
Malik Berkati
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