#BackToCinema – Amazing Grace – Aretha Franklin : cinquante ans après l’enregistrement du concert accueillant la Reine de la Soul sort enfin sur les écrans !
En janvier 1972, Aretha Franklin enregistre un album live dans une église intimiste et modeste du quartier de Watts dans une banlieue Sud de Los Angeles. Le disque de ce concert mythique, Amazing Grace, devient l’album de Gospel le plus vendu de tous les temps, consacrant le succès de la Reine de la Soul. Si ce concert a été intégralement filmé, les images n’ont jamais été dévoilées… Jusqu’à aujourd’hui.
Le film inédit de ce concert exceptionnel révèle l’incroyable grâce d’une Aretha Franklin bouleversante. Comme le rappelle le générique d’ouverture par des titres de chansons aux majuscules colorées qui apparaissent successivement sur l’écran, nous sommes en n 1972. La Reine de la Soul est au faîte de sa gloire à la veille de ses trente ans, en mars 1972.
Quatre ans plus tard, en 1976, elle fera vibrer les écrans du monde entier en entonnant Think dans les Blues Brothers, élargissant son répertoire au rhythm and blues.
En 1972, Aretha Franklin a déjà enregistré Respect, Chain of Fools, Bridge Over Troubled Water qui lui ont valu plusieurs Emmy Awards. Son label souhaite lui faire enregistrer les gospels qu’elle entonnait avec sa mère, elle-même chanteuse de gospel, sous la houlette de son père, pasteur baptiste.
L’enregistrement se déroule dans une petite église du sud de Los Angeles. La captation est confiée à Sydney Pollack qui a tourné On achève bien les chevaux et vient de terminer Jeremiah Johnson.
D’ailleurs, dans cette petite église, Sydney Pollack et son équipe sont les rares personnes blanches mis à part quelques spectateurs parmi lesquels on reconnaît Mick Jagger et Charlie Watts. Le chœur, mené par le Révérend Cleveland et les fidèles sont tous Afro-Américains.
On assiste à une entrée rythme et dansée par les membres du chœur, vêtus de noir et d’argenté. Puis le concert à proprement parlé commence et le Révérend Cleveland, qui préside l’office, invite l’audience à se manifester, à applaudir et à répondre aux chanteurs.
Le disque de cet enregistrement deviendra un succès mondial.
Pourtant, la production tarde à monter le film, d’abord pour des raisons techniques (le son n’était pas synchronisé), puis pour des raisons financières … En effet, il semblerait que la mythique chanteuse ait exigé un cachet supérieur à celui que la production lui proposé, exigence qu’elle a faite jusqu’à sa mort en août 2018.
Amazing Grace ne présente pas un moment de cinéma exceptionnel. Peut-être est-là la raison du manque de motivation de de Sydney Pollack monter ce film ? Les cinéphiles comme les critiques reprocheront au film son image granuleuse et une qualité de son faible et parasitée.
Les visages, filmés au plus près, dont celui d’Aretha Franklin et du Révérend Cleveland, laissent suinter la sueur qui dégouline sur leurs visages. On comprend aisément que l’émotion soit grande mais ces détails altèrent l’aspect visuel de ce concert. C’est la dimension musicale et, en particulier, la dimension de la prestation vocale d’Aretha Franklin, qui font de cet l’enregistrement un chapitre de l’histoire et de la société nord-américaine des années septante.
Malcom X et l’assassinat de Martin Luther King sont encore bien présents dans les esprits … Grâce au gospel, les communautés afro-américaines peuvent s’exprimer, donner de la voix. D’ailleurs, le film offre un riche témoignage quant aux coupes afro, très osées, parfois caricaturales. Les tenus sont bigarrées, chatoyantes, satinées. La Reine de ce concert n’est pas en reste et revêt des tenues seyantes aux amples manches, aux tons pastel qui mettent en lumière sa beauté.
Aretha Franklin impressionne l’auditoire comme les spectateurs du film qui restent impressionnés par la puissance de sa voix, la justesse de son timbre, l’immense amplitude de sa tessiture qui émeut même le Révérend Franklin, son père, qui vient lui rendre hommage à la fin du concert.
Un grand moment de musique gospel qui s’écoute surtout plus qu’il ne se regarde !
Firouz E. Pillet
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