En même temps, de Benoit Delépine et Gustave Kervern, marque le retour du duo de dézingueurs qui mettent, avec brio et par analogie, leur grain de sel dans la course des candidats aux élections présidentielles

À la veille d’un vote pour entériner la construction d’un parc de loisirs à la place d’une forêt primaire, un maire de droite décomplexée (Jonathan Cohen) essaie de corrompre son confrère écologiste (Vincent Macaigne) en lui donnant rendez-vous, officiellement pour une rencontre, pour ensuite l’entraîner dans un bar à hôtesses. Mais les deux rivaux se font piéger par une jeune femme, Sandra (India Hair), qui appartient à un groupe de jeunes activistes féministes qui réussit à les coller ensemble, coller au sens propre du terme. Cette cocasse et fâcheuse position les entraîne ensemble, malgré leurs divergences politiques, dans une folle nuit qui unit les deux hommes contre leur gré. Cette nuit promet d’être longue…

Ces deux élus sont aveuglés par leurs « convictions » très opposées et peu enclins à faire des concessions : l’un est un écolo pur sucre bio qui se déplace en voiture et en trottinette électriques, l’autre est un maire élu « extrême centre » et qui fait campagne pour être réélu. Tout en faisant campagne, le maire trompe fréquemment son épouse (Anna Mougla­lis) que son père, un habitué du car à hôtesses, lui avait présentée…

Aussi improbable que cela puisse paraître, ces deux politiciens vont donc se retrouver véritablement collés ensemble et tentent par tous les moyens de remédier à cette posture gênante : tentative de se décoller en passant par le cabinet vétérinaire d’un ami (Thomas VDB) du maire puis en faisant un tour de rodéo mécanique chez le patron du diner américain du coin (François Damiens). Les deux compères vont enfin retrouvé une autonomie relative après l’intervention des féministes pleines d’inventivité, Les « Colle-girls », qui ornent les statues et les plaques des rues de revendications féministes et de canulars sexistes hila­rants. Vincent Macaigne étonne par sa sobriété de jeu inhabituelle et Jona­than Cohen excelle avec sa retenue, alignant avec déraison absurdités, insa­ni­tés et provocations.

En même temps, de Benoit Delépine et Gustave Kervern, commence par une scène surréaliste et irrésistiblement drôle d’une langue qui lèche la main d’une jeune fille : les spectateurs reconnaîtront rapidement le visage de Yolande Moreau en tenancière d’un bouge, Le FMI, tenu par Madame Bianca.

À l’instar de leur film Effacer l’historique (2020) sur les affres et les dérives d’internet et des GAFAM, le tandem de scénaristes et réalisateurs signent une para­bole jubilatoire sur le vivre-ensemble, écologique, fémi­niste et paritaire. Tout aussi provocateur et à l’humour décalé, Benoit Delépine et Gustave Kervern poussent l’ab­surde et le burlesque au maximum, créant un chaos poli­tique rocambolesque pour le plus grand bonheur des spectateurs. Le tandem ne se contente pas de se tenir derrière la caméra, chacun des deux réali­sa­teurs fait son appa­ri­tion en tant qu’ac­teur déso­pi­lant dans des scènes inénarrables et drolatiques.

On sort de cette projection revigoré par cet humour audacieux qui ébranle les conventions et cette fine observation de notre société et de ses travers qui fait souvent mouche. Gustave Kervern et Benoît Déle­pine regorgent d’idées qui fusent tout au long du film et on imagine combien ils se sont amusés à écrire le scénario, livrant un pamphlet divertissant et jouissif contre l’hy­po­cri­sie en poli­tique, un sujet brûlant d’actualité. Ils prouvent une nouvelle fois combien leur imagination galopante foisonne d’idées, se renouvelant avec un bonheur communicatif, pointant avec justesse et bienveillance les bizarreries et les travers de la France provinciale.

Firouz E. Pillet

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