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Genève – 14ᵉ édition des Rencontres cinématographiques PALESTINE : Filmer c’est exister – PFC’E

Du 26 au 30 novembre 2025, Genève accueillera la 14ᵉ édition des Rencontres cinématographiques PALESTINE : Filmer c’est exister, un rendez-vous qui met en lumière la richesse et la diversité du cinéma palestinien. Organisé au MEG et aux Cinémas du Grütli, le festival se veut un espace de mémoire et de résistance, en résonance avec les luttes contemporaines du peuple palestinien.

Palestine : Filmer c’est exister Le nom de ce festival n’a probablement jamais été aussi signifiant. Le génocide à Gaza n’est pas documenté par la presse internationale, interdite d’accès à l’enclave. Les journalistes palestinien·nes sont délibérément ciblé·es et assassiné·es : d’après Reporters Sans Frontières, au 1er septembre 2025, plus de 210 journalistes ont été tué·es à Gaza depuis le 7 octobre 2023. La Cisjordanie occupée, soumise à un système d’apartheid, est assaillie de toutes parts par les colons et l’armée israélienne, avec des attaques quotidiennes contre les personnes, les maisons, les villages, les champs et les oliveraies. Selon les standards de l’ONU, aux qualifications d’apartheid, de crimes de guerre et de génocide imputés à l’État d’Israël s’ajoute l’épuration ethnique en cours, caractérisée par des démolitions de maisons, des expulsions forcées et des violences systématiques contre les Palestinien·nes.

Dans ce contexte de destructions tous azimuts, où l’objectif semble être d’effacer non seulement le peuple palestinien, mais aussi sa géographie et son histoire, s’ajoute une volonté manifeste d’anéantir sa culture riche et plurielle. Qu’elle soit artistique — littéraire, théâtrale ou musicale — à travers la destruction de lieux culturels, les arrestations arbitraires, les exils forcés ou les assassinats ciblés ; ou qu’elle relève des traditions et de la gastronomie, cette culture est continuellement menacée.

Le cinéma comme mémoire et résistance

Le cinéma demeure un vecteur puissant d’évocation, de réappropriation des récits et d’archivage de la mémoire. Cette année, de nombreux films d’importance majeure ont été présentés dans des festivals et sont sortis sur les écrans du monde. À cet égard, toujours à l’affiche en Suisse romande, All That’s Left Of You de Cherien Dabis retrace la Nakba à travers l’histoire d’une famille sur trois générations.

Mais la visibilité ne protège pas les artistes. Être récipiendaire d’un Oscar ou invité·e au Festival de Cannes n’offre aucune garantie de sécurité. Awdah Hathaleen, militant des droits humains et consultant sur le documentaire oscarisé No Other Land, a été assassiné le 28 juillet 2025 par Yinon Levi, colon israélien sous sanctions internationales, mais toujours libre de ses mouvements en Israël. Fatma Hassona, photojournaliste et poétesse de Gaza, protagoniste du documentaire Put Your Soul on Your Hand and Walk de la réalisatrice iranienne Sepideh Farsi, a été assassinée avec dix membres de sa famille par un missile ciblé israélien le 16 avril 2025, au lendemain de l’annonce de la sélection du film au Festival de Cannes et à la veille de son mariage.

Le bouleversant Put Your Soul on Your Hand and Walk sera projeté au PFC’E le dimanche 30 novembre.

Le festival propose également une réflexion sur l’évolution du cinéma palestinien, retraçant son histoire depuis les années 1960 jusqu’à aujourd’hui. La programmation met en lumière les œuvres révolutionnaires de cette période et leur résonance avec les préoccupations contemporaines des cinéastes. Les thématiques abordées — notamment la place des femmes dans la société et la préservation de la culture — témoignent d’une continuité dans la lutte pour l’identité et la dignité.

Le MEG (Musée d’ethnographie de Genève), partenaire du festival, joue un rôle central en intégrant le cinéma palestinien dans sa démarche décoloniale globale. Le vernissage de l’exposition de l’artiste Nur Dasoki, intitulée Je suis Palestinienne, j’ai le droit de broder comme les Palestiniennes, se tiendra le jeudi 27 novembre à 18 h. Cette exposition met en lumière le travail de Dasoki qui, à travers la broderie, tisse mémoire et héritage, affirmant une identité palestinienne riche et complexe.

Vena Ward, responsable presse des Rencontres cinématographiques PFC’E, souligne :

« Le festival met en avant la voix des réalisatrices palestiniennes, dont les œuvres puissantes et sensibles racontent la vie, la mémoire et la résistance à travers une perspective féminine trop souvent invisibilisée. De Laila Abbas, qui signe avec Thank You for Banking With Us! un premier long-métrage audacieux sur la solidarité entre sœurs dans une société patriarcale, à Nada Khalifa, Shrouq Ayla ou encore Heiny Srour, pionnière du cinéma arabe, ces cinéastes affirment la place essentielle des femmes derrière la caméra. Leurs films, entre intimité et révolte, témoignent d’une création libre, politique et artistique, qui redonne aux femmes palestiniennes toute leur force narrative et créative. »

Liberté d’informer et rencontres avec le public

À l’heure où la déshumanisation des Palestinien·nes dans le monde occidental — y compris en Suisse, pays où la Croix-Rouge a été fondée et où les Conventions de Genève ont été signées, mais où certain·es responsables cantonaux refusent ou tergiversent quant à l’accueil dans leurs hôpitaux d’enfants gazaouis blessés — se fait sentir plus que jamais ; et alors même que ce phénomène, tristement classique dans la relation asymétrique qu’entretiennent les pays du centre du système-monde avec la Palestine — particulièrement en Europe, encore marquée par le poids d’une longue histoire d’antisémitisme endémique dont les exactions cumulées sur des siècles ont culminé avec la Shoah  — se renforce du fait que les médias et observateur·ices internationaux et indépendant·es sont interdit·es de Gaza et n’accèdent qu’avec difficulté à la Cisjordanie occupée, les rencontres avec le public apparaissent plus nécessaires que jamais.

— Clara Khoury et Yasmine Al Massri – Thank You for Banking With Us!
Image courtoisie August Films, In Good Company Films, Lagoonie Film Production

Cette année encore, PFC’E accueille cinq cinéastes palestinien·nes : Michel Khleifi, figure majeure du cinéma palestinien (La Mémoire fertile, Noce en Galilée, Ma’loul fête sa destruction), présent dès la première édition du festival ; Sohail Dahdal, pionnier du cinéma immersif (Once Upon a Time in Palestine) ; Waseem Khair, documentariste et cinéaste engagé (120 km, Gaza Bride 17) ; et Nada Khalefa, réalisatrice du poignant Qaher.
Par visioconférence, le public pourra également échanger avec Laila Abbas, jeune voix du cinéma palestinien contemporain, dont Thank You for Banking With Us! ouvre le festival, ainsi qu’avec Iyad Alasttal, Jumana Manna — qui avait participé au festival en 2022 avec Cueilleurs et clôturera cette année PFC’E avec A Magical Substance Flows into Me, documentaire de 2016 sur l’histoire de la musique en Palestine historique — et Shrouq Aila, en direct depuis Gaza.

Puisque l’un des enjeux majeurs de cette période sombre est la liberté d’informer et l’intégrité physique des journalistes, le festival abordera cette thématique le 29 novembre. Deux films donnant la parole à des journalistes gazaoui·es seront projetés, suivis d’une table ronde organisée en collaboration avec le quotidien Le Courrier. Celle-ci portera sur le traitement médiatique du génocide à Gaza ainsi que sur les biais à l’œuvre dans de nombreux médias face à cette tragédie.
Participant·es  : Melissa Müller, journaliste indépendante basée à Zurich ; Myret Zaki, journaliste suisse romande ; Guy Zurkinden, de la rubrique Solidarité internationale du Courrier ; médiation assurée par Roderic Mounir, journaliste au Courrier.

https://palestine-fce.ch

Malik Berkati

Pour lire le rapport publié le 3 juillet 2025 de Commission d’enquête de l’ONU sur le territoire palestinien occupé (PDF en anglais)

Pour lire le rapport publié le 16 septembre 2025 lors de la 60session du Conseil des droits de l’homme des Nations unies par la Commission d’enquête internationale indépendante de chargée d’enquêter dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est (PDF en anglais)

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