La dentelle : un tissu noble et précieux. Exposition à Calais jusqu’au 13 janvier 2020
La renommée Cité de la Dentelle à Calais a donnée carte-blanche au créateur belge Olivier Theyskens dont c’est le tissu de la prédilection.
« La dentelle est un produit extrêmement compliqué dans la mise au point, les usines sont un univers très brutal et plein de poussière. On travaille comme il y a 100 ans pour fabriquer ce tissu délicat et précieux »
a affirmé le styliste, directeur des maisons Rochas et Nina Ricci.
La Commissaire de l’exposition, visible jusqu’au 13 janvier 2020, Lydia Kamitsis indique que In praesentia présente aussi un riche patrimoine ainsi que les personnes qui produisent et travaillent la dentelle.
La plus grande curiosité de l’endroit est un grand métier à tisser de 1907, une gigantesque machine en fonte, faisant un bruit énorme.
« On n’a pas fait mieux mécaniquement depuis. Ces machines, si elles sont entretenues correctement, peuvent servir 200-300 ans »
souligne Delphine Nicola, la responsable du musée qui se trouve au centre d’une véritable usine de dentelle du 19e siècle. L’unique élément de modernité est l’introduction du numérique remplaçant les cartes perforées qui, auparavant, créaient le dessin de la dentelle. L’ordinateur accélère l’élaboration des motifs qui se réalise en une semaine contre deux ou trois mois avant. Les interventions sur le métier se font manuellement sans possibilité de lubrification à l’huile car cela laisse des traces sur la dentelle. La poudre de graphite fait les tâches sans abîmer le tissu mais il faut sept heures pour nettoyer les grains de poussière. Si un fil se défait, l’étoffe est immédiatement raccommodée à la main et avec des machines à coudre.
Expérience émotionnelle
Theyskens, qui a découvert ce tissu grâce aux vieux coupons et rubans de sa grand-mère normande, pense que la dentelle ne se démode jamais :
Il faut la traiter de façon décalée, comme a réussi Alexander McQueen avec la dentelle coupée. Dans mes premiers souvenirs des années 80, la dentelle était intimement liée à l’univers de la lingerie, exclusivement féminine et grandement rock.
Le visiteur peut voir la célèbre pièce de la collection privée de cet autodidacte de 42 ans : un corsage noir en satin de soie, dentelle et broderie de jais, une pièce d’études des années 80 du siècle dernier, trouvé aux Puces qui a inspiré la couleur et la ligne de ses créations pour Madonna, Cate Blanchett ou Nicole Kidman.
Le designer essaie de faire abstraction de la dentelle en rebrodant les créations avec des fibres, jouant sur superpositions. Mais In praesentia est d’abord imaginée comme une expérience émotionnelle, construite par fragmentation et collisions se référant à la conversation créative entre l’œuvre du couturier et les collections historiques de la Cité de la Dentelle.
Djenana Mujadzic
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