Locarno 2021 – Beckett de Ferdinando Cito Filomarino ouvre la 74e édition du festival international du film de Locarno
Le nouveau directeur artistique du Festival international du film de Locarno, Giona A. Nazzaro, veut insuffler un nouvel air du temps cinématographique sur la Piazza Grande, son credo : ne pas opposer les genres de cinémas ni les façons de les regarder, allier le cinéma d’auteur avec les productions plus grand public et ne pas s’empêcher de proposer des films achetés ou produits par les nouvelles plateformes de streaming. L’idée est louable dans son esprit d’inclusion des publics, mais surtout pragmatique dans le contexte de vampirisation numérique des contenus cinématographiques par un cartel, pour l’instant étasunien, de plateformes. Pour Giona A. Nazzaro, la qualité du film est le critère principal dont il faut tenir compte. C’est ainsi que l’ouverture du festival s’est faite ce mercredi 4 août avec Beckett du réalisateur italien Ferdinando Cito Filomarino, un film présenté en Première mondiale dans la sélection Piazza Grande… avant qu’il ne soit diffusé le 13 août sur Netflix qui n’a pas produit le film mais en a acheté les droits.
Un couple de touristes étasuniens, April (Alicia Vikander) et Beckett (John David Washington) très amoureux, quittent Athènes, où ils passent leurs vacances, pour fuir le désordre de la capitale secouée par de nombreuses manifestations politiques. Ils passent la première demi-heure à auto-célébrer dans un babillage a bâton rompu leur amour… et puis survient le drame: un grave accident de voiture brise l’idylle. Ici, un twist que l’on croit salvateur – si ce n’était le design sonore qui appuie péniblement sur le côté mystérieux et dangereux du déroulé – se fait dans l’histoire: Beckett devient la cible d’une chasse à l’homme, sans qu’il ne sache pourquoi.
Hélas, cette resucée de thrillers politiques brillants de la génération de Sydney Pollack ne tient jamais la route, pire, les élucubrations scénaristiques finissent par faire rire le public censé être plongé dans un tourbillon d’action. Beckett, un homme parfaitement ordinaire, du moins c’est ce que l’on ressent puisqu’on ne sait rien de lui si ce n’est son amour pour April, se trouve embarqué dans une course-poursuite de survie où il se fera tirer dessus, poignarder, frapper, menotter, ce qui ne l’empêchera jamais de sauter dans le vide pour s’échapper, se relever, recommencer à courir, emprunter des téléphones, rencontrer des personnes qui parlent anglais et le guident dans sa compréhension du complot dont il est malgré lui partie prenante. Non, décidément, il n’y a pas grand-chose à sauver de cette histoire alambiquée si ce n’est une réalité: l’atmosphère fascisante qui étouffe la Grèce depuis de nombreuses années. Mais sur ce sujet, les deux films documentaires d’Angélique Kourounis – Aube dorée : une affaire personnelle et Aube Dorée l’affaire de tous – sont bien plus édifiants.
De Ferdinando Cito Filomarino; avec John David Washington, Alicia Vikander, Boyd Holbrook, Vicky Krieps, Panos Koronis; Italie; 2021; 108 minutes.
Malik Berkati, Locarno
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