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Qu’est-ce que le OFF d’Avignon ? “Le plus grand théâtre du monde” – Entretien avec Raymond Yana, président du OFF

Avec plus de 1 400 spectacles et événements, plus d’1 300 000 entrées, le OFF est un des plus grands festivals de compagnies indépendantes au monde par la richesse et la diversité de ses offres culturelles. C’est aussi le seul salon du théâtre où se donnent rendez-vous chaque année près de 4 000 professionnels du spectacle, programmateurs, journalistes, représentants des institutions et diffuseurs. Devenu une réalité incontestable dans le paysage culturel de notre pays, véritable phénomène de société, le OFF d’Avignon participe à la renommée de la Ville, du Département et de la Région par son rayonnement national et international. En 2016, nous célèbrerons les 50 ans du festival, du 7 au 30 juillet !

Mais encore….
Le Off, incroyable salon du spectacle vivant et manifestation culturelle à dimension internationale, proposait en 2015, 1336 spectacles. Près de 8000 artistes issus de la France entière et de 27 pays étrangers accueillaient les festivaliers dans plus de 130 lieux différents. Ces compagnies transforment Avignon en une immense scène artistique où sont représentés tous les arts du spectacle vivant : théâtre, lecture, café-théâtre, cirque, danse, musique, spectacles de rue… textes classiques, modernes, contemporains, pour tous les publics, de tous âges.
Sans compter les rencontres, ateliers et débats, la grande parade d’ouverture, les apér’Off et le bal de clôture…
Pendant cette manifestation, divers lieux accueillent les festivaliers, qui peuvent s’y procurer les programmes, les cartes d’abonnement et les tracts des compagnies.
Le Village du OFF, pendant la durée du festival, est un lieu entièrement voué à la vie du Off, de ses troupes et de son public ; il est implanté sous un large chapiteau dans l’école Thiers, et présente toute une gamme d’animations, de rencontres, de lectures, de conférences et forums, de concerts,  d’expositions, la web tv, mais également un bar et restaurant, et une boutique.
Le Programme en ligne sur le site du Off début juin 2016, version papier disponible tout début juillet 2016. Une carte d’abonnement est mise en vente en juin, donnant droit à des réductions sur les spectacles du Off, sur les billets d’entrée de certains monuments d’Avignon et de Villeneuve lez Avignon…

Interview de Raymond Yana, Président de l’AF&C- Le OFF

— Bureau_af-c OFF – Raymond Yana à droite
© Florence Signoret

L’objectif du OFF : replacer l’artistique au centre des préoccupations !
Le nouveau Président de l’Association Avignon Festival & Compagnies (AF&C), Raymond Yana, impulse, avec le Conseil d’Administration, un souffle fort sur le « Plus Grand Théâtre du Monde », avec de nouvelles orientations plus professionnelles, plus consensuelles, plus écologiques… plus artistiques !

Même si vous connaissez le OFF comme votre poche, faisons, à notre tour, davantage connaissance avec vous, Raymond Yana ?

Volontiers ! Comme vous l’avez dit, je connais le OFF puisque j’y participe depuis 21 ans. Par ailleurs je suis un des cofondateurs d’AF&C et membre élu de son Conseil d’Administration depuis 2006. Je succède à Greg Germain, ayant été élu Président d’AF&C le 13 janvier 2016. Je revendique également mon travail de comédien, de metteur en scène, de codirecteur artistique d’une compagnie « La Courte Echelle » qui présente 1 à 2 spectacles chaque année à Avignon ainsi que mon travail de codirecteur artistique de deux lieux : l’espace Alya et le Chapeau d’Ebène, Théâtre où nous accueillons 30 compagnies.

Cette année, je ne vais évidemment pas jouer; ce serait bien trop compliqué ! Je ne vais pas mettre en danger mes spectacles et les autres comédiens, qui n’ont pas à subir ce que j’ai décidé d’accomplir bénévolement pour le OFF comme chaque membre du conseil d’administration.  Quand je ne serai pas dans ma mission de Président d’AF&C,  je serai dans mon lieu, j’installerai mon décor, je réglerai les lumières avec mes comédiens, je serai avec eux, parce que cela est mon travail !

Les compagnies que j’accueille chez moi, me voient porter mes décors, transpirer, être inquiet quand les réservations ne sont pas au beau fixe, stresser quand je n’ai pas eu les programmateurs que j’aurais voulu avoir. Je vis exactement la même chose que toutes les compagnies. Quant aux directeurs de lieux, ils savent aussi que je vis la même chose qu’eux puisque j’en anime deux. J’ai les deux casquettes.


Cette année, le festival OFF fête sa cinquante-et-unième édition, avec de nouvelles impulsions. Pouvez-vous en évoquer quelques exemples, en ce qui concerne le Village du OFF ?

Nous conserverons l’univers de convivialité qui en fait son succès.Cette année, le Village du OFF se dotera d’ un espace scénographique ouvert, avec des parois végétales et modulables, en fonction du type de rencontres, organisé dans un Espace Ag ora. Le public entrant dans le village pourra ainsi voir ce qu’il se passe à l’intérieur de cette Agora. Le village du Off  va s’ouvrir tant dans la forme que dans le fond… car les échanges et les débats seront absolument privilégiés. Notre ambition est d’associer le public et les professionnels à la réflexion des artistes. Ceux-ci ne doivent pas être de simples détenteurs de cartes mais doivent  être également conviés à des moments d’échanges au Village du OFF.Un espace spécifique sera également dédié aux compagnies pour qu’elles puissent rencontrer des professionnels.Enfin, nous rendrons ce Village plus accessible à tous, notamment aux personnes à mobilité réduite, en aménageant le rez-de-chaussée pour l’accès public, le premier étage, lui, ne sera utilisé que pour les locaux d’AF&C réservés à son personnel.

D’autres changements notables au village du Off?

Tout d’abord, nous avons la volonté d’impliquer et faire participer les compagnies afin de redynamiser le souffle artistique du OFF. Nous avons décidé, par exemple, de créer une grille de programmation plus importante, où toutes les 2 heures, au niveau de l’Agora, s’alterneront des événements différents. Nous souhaitons confier aux compagnies qui le souhaitent, la prise charge de l’organisation de rencontres autour de leurs propositions artistiques, en invitant le public d’autres compagnies, des professionnels ; deux à trois créneaux par jour y seront consacrés.
C’est un peu ça, le nouveau souffle, le nouvel élan du OFF : Revenir à l’artistique et parler un peu moins du marché, même s’il existe ! Car ce qui intéresse le public, ce sont les artistes, l’échange avec les personnes qui aiment le théâtre, et qui viennent assister à des rencontres !

Un beau programme qui engage à la discussion, comme les diverses rencontres que vous prévoyez. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Oui. En collaboration avec un journal important, nous allons faire venir des auteurs ayant une proximité avec le théâtre, connus et médiatisés, pour parler de leurs œuvres. Cet événement de type « salon du livre » permettra au public de rencontrer leurs auteurs de prédilection avec qui ils pourront échanger et se faire dédicacer leurs ouvrages. La presse relaiera leurs venues.
Ce que l’on espère, c’est qu’une fois sur place, une fois que les personnes auront goûté au Festival d’Avignon, elles « attrapent le virus »…  qui leur donnera envie d’y revenir !
Le théâtre, ce n’est pas seulement la distraction, c’est aussi la réflexion.

Par ailleurs nous avons bien conscience que nous sommes à un an des élections présidentielles. Par tradition, beaucoup de personnalités politiques passent au Village du OFF. Ainsi, nous envisageons « d’orchestrer » leurs visites, avec des créneaux  de rencontre d’environ 2 heures pour échanger, voire écouter les artistes, le public et toutes les personnes qui auront envie de leur donner leur avis, dans une sorte de « carrefour de la parole démocratique ». Avec le mouvement « Nuit Debout », on a bien senti qu’au niveau de la population, il y avait un besoin de parler. J’espère qu’un cercle vertueux se créera dans lequel on pensera que cela vaut la peine de passer 2 heures à échanger avec les uns et les autres. En tout cas, nous avons cette ambition-là ! Et on va l’organiser…

Ce qui vous caractérise, Raymond Yana, c’est cette omniprésente envie de dialogue et de réflexion commune…

Je crois que c’est cela le véritable esprit du OFF ! Certes, il est vrai qu’une compagnie vient au festival d’Avignon pour proposer son spectacle à des professionnels susceptibles de faire le faire tourner,  mais c’est également pour présenter son spectacle au public. Ce qui importe à Avignon, c’est surtout que le public entre dans une salle, voie un spectacle, l’apprécie ou non, et échange ensuite avec les artistes, s’il le souhaite ! C’est ça, le OFF ; c’est ce qui fait son intérêt, son originalité. En ce qui me concerne , je peux vous dire que quand nous sommes en tournée, jamais on ne retrouve avec le public, la relation que l’on a avec celui du Festival d’Avignon ! Quand on finit un spectacle à Avignon, il est très rare qu’il n’y ait pas un public qui souhaite échanger sur ce que l’on a proposé.

« 50 ans de créations » cette année… et un soutien à la professionnalisation du festival ?

Sur le programme, apparaîtra clairement une petite pastille « Création Avignon 2016 ». Celle-ci concernera les spectacles présentés au Festival d’Avignon pour la première fois.
D’autre part, nous apporterons un soutien à la professionnalisation du Festival, en effet ! Nous devons nous doter d’éléments permettant de professionnaliser et de responsabiliser les acteurs du festival. Une distinction sera plus nette au sein du catalogue, entre les compagnies professionnelles et les compagnies à pratique amateur. Puis, nous comptons sur la mise en place d’outils de professionnalisation qui valorisera les lieux en tenant compte de la qualité d’accueil des compagnies, des prestations techniques, des mesures d’accompagnement, du travail de communication.
Enfin, nous privilégierons la création de passerelles entre le Festival d’Avignon et le OFF !

Pouvez-vous expliquer le concept d’ «Éco-festival » ?

L’affichage représente un gaspillage économique pour les compagnies comme pour la ville et c’est un désastre écologique qui n’est plus acceptable. Nous souhaitons, pour les 3 années qui viennent, déployer une sensibilisation forte auprès de tous les protagonistes du festival en vue d’une véritable réflexion écoresponsable : la substitution de l’affichage actuel par une occupation graphique mettant en valeur toutes les propositions artistiques des compagnies. Cette évolution doit s’accomplir en accord avec la Mairie. Notre commission Éco-festival travaille d’ailleurs avec les services de celle-ci. Très concrètement, pour cette année, ce qui est acté par la Mairie concerne la rue des Écoles ainsi que les grilles du square Saint-Agricol, où il sera interdit d’afficher comme on le fait maintenant, c’est à dire d’une manière un peu sauvage. Dans ces lieux, de nouveaux types d’affichages sur lesquels travaille la Commission Éco-festival, y seront proposés. Nous irons progressivement, l’affichage du OFF faisant aussi partie du folklore. Mais c’est notre vœu d’y parvenir, tout en prenant en compte l’avis de tous, comme toujours !

Savez-vous le nombre de retombées économiques que le OFF a sur le territoire du Grand Avignon ?

Le monde attire le monde. Si mes informations sont bonnes, près de 80 millions d’euros de retombées économiques, sur 100 millions d’euros en tout, y compris le IN.

www.avignonleoff.com

Florence Signoret

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Florence Signoret

Journaliste / Journalist (basée à Marseille)

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