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Toronto International Film Festival (TIFF) – Whether the Weather Is Fine (Kun Maupay Man It Panahon) de Carlo Francisco Manatad transforme une catastrophe naturelle en une expérience psychédélique!

Après sa sélection au festival de Locarno 2021 dans la section Cineasti del presente où il a remporté le Prix Cinema&Gioventù, Whether the Weather Is Fine (Kun Maupay Man It Panahon) est présenté au TIFF 2021.
Le 8 novembre 2013, le super-typhon Haiyan, traversait l’archipel des Philippines, laissant derrière son passage des dizaines de milliers de blessés, une dizaine de milliers de morts et disparus et des régions entières dévastées. Partant de cette tragédie, le cinéaste philippin Carlo Francisco Manatad prend comme décor sa ville natale Tacloban, en grande partie réduite en ruines après le passage de Haiyan.

— Charo Santos – Whether the Weather Is Fine (Kun Maupay Man It Panahon)
Image courtoisie TIFF

Dès la première image, on est projeté dans la tempête, de manière d’autant plus impressionnante qu’elle est symbolique : sur l’écran en format 4 :3, on voit l’œil du cyclone en forme de carte météorologique qui se forme en direct sous nos yeux sur fond sonore dévastateur. Puis, le cinéaste entre dans la réalité, usant du contraste de perception des sens, sur une petite musique tranquille, une vue du ciel, un espace d’habitation dévasté avec des gens qui marchent au milieu des débris et de personnes visiblement mortes. Un jeune homme affalé sur un canapé se réveille et commence, hagard, à avancer dans les ruines. Miguel (Daniel Padilla) part à la recherche de sa mère (Charo Santos) et de son amie Andrea (Rans Rifol). Sa lente déambulation nous entraîne dans le tourbillon désespéré de l’après-catastrophe, avec  ceux qui recherchent les leurs, ceux qui sont prêts à tout pour survivre, ceux qui pillent, ceux qui se battent pour des rations de nourriture, les centres de secours débordés, les enfants qui jouent au milieu de la débâcle des adultes… La confusion règne, ceci d’autant plus qu’une autre tempête est annoncée. Les gens doivent se décider à partir dans des convois maritimes de secours en direction de Manille ou rester.

— Daniel Padilla et Rans Rifol – Whether the Weather Is Fine (Kun Maupay Man It Panahon)
Image courtoisie TIFF

A priori, le choix est simple : bien sûr, il faut partir ! Mais il s’avère que les choses ne sont pas aussi faciles. Une fois réunis, Miguel, sa mère et Andrea se mettent en route vers le bateau, mais à mesure qu’il et elles avancent, le projet commun se complique, leurs directions se séparent.

Parfois surréaliste, remplit d’humour noir, Whether the Weather Is Fine est surtout l’occasion d’explorer les recoins de l’âme humaine qui, lorsqu’elle est surmenée, cherche des voies d’évitement pour ne pas totalement sombrer. Ici, dans cette région périphérique du pays, la religion, la bigoterie, la superstition sont des catalyseurs de survie au quotidien. Lorsqu’un désastre d’une telle ampleur vient anéantir le peu de qualité de vie que l’on possède, le recours fétichiste aux forces surnaturelles s’accentue.

Le talent de Carlo Francisco Manatad est de proposer un film à la fois pleinement réaliste dans sa description de l’après-catastrophe et totalement psychédélique dans sa perception intime de désorientation qu’il parvient à transmettre de manière très cinématographique, avec cette fabuleuse scène où un officiel de l’armée fait une annonce à la foule dans un langage incompréhensible, suivi d’un enfant habillé en soldat qui leur parle clairement et logiquement, leur demandant de ne pas se battre et d’essayer d’organiser les choses dans l’ordre et le calme.

Whether the Weather Is Fine (Kun Maupay Man It Panahon) de Carlo Francisco Manatad
Image courtoisie TIFF

Cet épisode réel retranscrit par le cinéaste préfigure peut-être notre monde qui s’engloutit sous le changement climatique. Et cela ne donne vraiment pas envie de vivre dans cet esprit apocalyptique où certains dansent sous les feux d’artifice, d’autres partent en panique. Cependant, le problème est que, à terme, nous ne pourrons nous faire évacuer nulle part ! On peut donc continuer à accumuler, danser, croire, chanter, s’entretuer –  en attendant la catastrophe semble inéluctable.

De Carlo Francisco Manatad; avec Charo Santos, Daniel Padilla, Rans Rifol; Philippines, France, Singapour ; Indonésie, Allemagne, Qatar ; 2021 ; 104 minutes.

Malik Berkati

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