61e Berlinale 10-20 février 2011
La 61ème édition du Festival international du film de Berlin débute aujourd’hui avec deux événements remarquables et remarqués. Le premier est cinématographique, avec le film d’ouverture hors compétition, “True Grit“, à la tête du box office étatsunien et nommé 10 fois aux Oscars, qui entame ainsi en fanfare sa carrière européenne.
L’autre événement est d’ordre plus politique et symbolique: la chaise laissée vide au milieu du jury de la compétition, celle du réalisateur iranien Jafar Panahi condamné à six ans de prison et vingt ans d’interdiction d’exercer son métier.
“True Grit” comme film d’ouverture est une véritable réussite pour le festival, tant au niveau filmique que celui touchant au prestige de ce festival qui reste majeur malgré la multiplication des festivals de cinéma dans le monde. La chaise vide de Jafar Panahi est également un coup de maître de Dieter Kosslick, qui fête cette année ses dix ans à la tête de la Berlinale. Il est bien sûr sincère dans cet engagement, tout comme le reste du jury qui soutient cette action, avec à sa tête l’actrice et réalisatrice Isabella Rosselini qui voit dans cette chaise vide au sein du jury”la représentation du talent du réalisateur mais aussi celle de la liberté d’expression”. Il n’en reste pas moins que ce geste symbolique, que Dieter Kosslick espère “être un message qui touchera les autorités iraniennes”, génère quelques questions que peu osent poser, celles-ci n’étant pas dans l’air du temps. Qu’en est-il de la liberté d’expression dans d’autres pays, par exemple? Les réalisateurs du monde arabe ont-ils été autant soutenu que les réalisateurs iraniens jusqu’à présent? Quid des films palestiniens réalisés par des Palestiniens et non par des Israéliens ou Israéliens Palestiniens ou occidentaux se penchant sur la Palestine? Qu’en est-il des films africains, qui certes ont peine à atteindre une qualité internationale, mais qui pourraient faire l’objet de projets de supports culturels? La Berlinale, dans ses sections parallèles, affectionne les modes: nous avons vu passé les années pays de l’est, celles de la Chine, de la Thaïlande, de l’Argentine, de la Scandinavie, de l’Iran… Cette année, cela semble être l’année du lapin, avec la Corée du Sud. Mais d’Afrique – y compris du nord, toujours point.
Oui, il faut que Jafar Panahi soit libéré et puisse exercer son métier. Oui il faut le soutenir. Mais se faisant, ne pas oublier de s’ouvrir aux expressions de nombre d’opprimés qui peuplent également la terre cinématographique.
Malik Berkati
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