Au nom des amitiés improbables : Emir Kusturica directeur du Théâtre de l’armée russe

Sergueï Choïgou, ministre russe de la Défense, a offert au cinéaste Emir Kusturica le poste de directeur du Théâtre académique central de l’armée russe !
Étonnante nomination qui ressemble à une moquerie intervenue dans le cadre de la guerre en Ukraine ;  selon le ministre, elle honore des relations amicales de longue date, avec le réalisateur Bosnien devenu Serbe, et son rôle dans la préservation et le développement des meilleures traditions de la culture russe ! Kusturica, qui possède aussi la nationalité française, avait affirmé en 2014 que la Russie doit défendre ses ressortissants vivant en Ukraine.

Souvent présent sur les scènes hexagonales, avec son Non Smoking Orchestra, le réalisateur a adapté pour le théâtre son célèbre film Le Temps des Gitans (1988) dans un opéra punk joué à la Bastille en 2007 et repris un an plus tard au Palais de Congrès. Son ami de jeunesse Goran Bregovic avait adapté et écrit de nouveaux arrangements musicaux pour le très ancien thème de Ederlezi, interprété depuis deux siècles par les Tziganes des Balkans, et l’avait nommé Djurdjevdan (Le jour de la Saint Georges), en 1989 avant la sortie du film. Les deux amis qui ne se parlent plus depuis plus d’une décennie, ont collaboré sur Arizona Dream en 1993 et Underground sorti en 1995 et pour lequel il a obtenu sa deuxième Palme d’Or à Cannes. Kusturica qui a, selon des rumeurs venant des professionnels, perdu l’inspiration car il n’a pas tourné de longs métrages depuis 2016 après le catastrophique film On The Milky Road, a abandonné le septième art. D’autres indiquent qu’il prépare pour le grand écran, une fresque historique sur Gengis Kahn.

Amuser les soldats

Le Théâtre académique central fut créé en 1929, sous Staline. À l’origine un théâtre itinérant, l’Académie a été fondée tout d’abord pour amuser les soldats. Kusturica a rencontré le ministre Choïgou il y a quelques jours et remercié pour «l’honneur exceptionnel reçut de la part du gouvernement russe». Les connaisseurs des stratégies de celui dernier soulignent qu’il s’agit d’une ruse parmi d’autres, dont le président actuel est un spécialiste. Cela n’a pas empêché le cinéaste serbe de commenter sa nouvelle fonction avec grande joie, indiquant être « le gardien des valeurs classiques dans un monde en perpétuel changement » ! Il espère adapter sur la scène russe son film La vie est un miracle (2004) qui a reçu le César du meilleur film de l’Union européenne, en 2005.

Djenana Djana Mujadzic

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