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Back to Black, biopic très attendu sur la carrière fulgurante et la vie en montagnes russes d’Amy Winehouse, manque sérieusement d’objectivité et laisse une impression mitigée

Réalisé par Sam Taylor-Johnson – l’auteur de 50 Nuances de Grey (2015) – Back to Black plonge le public dans la vibrante époque musicale à Londres au début des années 2000 et dans la frénésie du district de Camden tout en suivant le parcours de la chanteuse londonienne de ses débuts jusqu’à la célébrité et sa fin tragique qui l’a fait entrer dans le tristement célèbre Club des 27, rejoignant les artistes qui l’ont précédée, mort*es à cet âge.

— Marisa Abela – Back to Black
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Le biopic retrace la vie et la musique d’Amy Winehouse, à travers la création de l’un des albums les plus iconiques du début du XXIe siècle, inspiré par son histoire d’amour passionnée et tourmentée avec Blake Fielder-Civil. En 2006, son deuxième album Back to Black, récompensé d’un Grammy aux États-Unis, l’a fait connaître dans le monde entier, porté par son tube Rehab, dans lequel la londonienne racontait sa bataille contre les addictions. C’est le titre de cet album que le réalisateur a choisi pour intituler son biopic.

L’actrice anglaise Marisa Abela, choisie pour interpréter la chanteuse, offre des ressemblances physiques troublantes dès l’ouverture du film : à l’instar d’Amy Winehouse, l’actrice porte le même piercing au coin de la lèvre et affiche la même coiffure crêpée qui fleure bon les sixties. La comédienne a tout mis en œuvre en peaufinant les détails de son jeu pour atteindre un mimétisme déroutant et il faut admettre que, parfois, Marisa Abela disparaît et Amy Winehouse apparaît à l’écran, tenant comme son modèle la tête légèrement de côté.

Volontairement, Sam Taylor-Johnson a choisi de ne pas se soucier des démons qui tourmentaient Amy Winehouse, démons notoirement connus pourtant. Par ce choix, le cinéaste ignore l’enfer que la chanteuse a traversé, un enfer qui a souvent été source d’inspiration pour la composition de ses chansons. Choisissant de privilégier la relation entre la star britannique et Blake Fielder-Civil, son ex-mari, le réalisateur montre que ce dernier se drogue mais omet de de montrer que c’est Blake qui a entraîné sa dulcinée dans les abysses vertigineux de la drogue. Souvent considéré comme le responsable de l’addiction de la chanteuse, on constate juste qu’il a refait sa vie avec une autre femme et attend un enfant, le tout à l’insu d’Amy Winehouse qui découvre le pot aux roses par l’intermédiaire des questions des paparazzi.

Non seulement le film occulte de nombreux chapitres de la vie éphémère d’Amy Winehouse et revisite de manière irrespectueuse des faits critiques de la vie de l’artiste mais, ce qui semble encore plus dramatique, ne parvient jamais à transmettre la profondeur émotionnelle de sa musique, l’intensité de ses paroles qui découlent directement des épreuves auxquelles elle a été confrontée et des défis qu’elle a relevés.

Si Back to Black rappelle combien la chanteuse a été harcelée par les photographes et victime des tabloïds, le film se révèle extrêmement inégal, faisant se succéder des erreurs de jugement catastrophiques. Il présente le père de la chanteuse tel un saint, constamment disponible et dévoué à sa fille alors que nos souvenirs affleurent à nos mémoires : on se souvient que la réalité était tout autre et que le père d’Amy Winehouse était surtout présent pour profiter du compte en banque de sa fille. Les fans de l’artiste sont déjà montés aux barricades et avant même la sortie du film en Suisse, le film a été critiqué aux États-Unis et au Canada pour ses partis pris sur la vie de la défunte chanteuse et pour avoir survolé la réputation sulfureuse de l’artiste sans donner tous les éléments de sa vie comme de sa personnalité. Dès les prémices du projet, Mitch Winehouse, accusé par les fans d’exploiter l’image de sa fille, continue de défendre le projet et sa distribution.

Quand le générique de fin défile sur le grand écran, on se dit que la performance de Marisa Abela reste plutôt une pâle imitation du modèle malgré tous ses efforts. On s’interroge sur ce biopic qui va indubitablement contrarier les fans inconditionnels de la chanteuse. On se questionne d’autant plus sur le bien-fondé de réaliser un tel film qui semble bien inutile. Ces deux heures de mélodrame semblent on ne peut plus éloignées de la réalité et le Back to Black de Sam Taylor-Johnson se résume à un mercantile prétexte d’exploitation d’Amy Winehouse.

Il apparaît alors quelque peu facile et lâche de s’approprier une vérité bien documentée. Outre le profond manque d’originalité, Back to Black met en lumière un problème crucial dans la transformation de la vie d’une personne réelle en un film destiné à la consommation de masse et au chiffre d’affaires. Pourtant, emplie de drame, de passion et de tragédie, l’histoire d’Amy Winehouse se prêtait parfaitement au grand écran !

Pour celles et ceux qui ne l’auraient pas encore vu, courez voir le documentaire d’Asif Kapadia, sobrement intitulé Amy (2015) qui, en accédant à une énorme richesse de vieilles vidéos d’amis et de famille, de lettres de paroles et de chansons lues par l’artiste, d’appels téléphoniques archivés, d’images des coulisses, d’apparitions dans les médias et de performances inédites, tisse un récit magistral, poignant, véridique et convaincant et brosse un portrait honnête et équilibré sur une personnalité complexe.

Firouz E. Pillet

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