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Cannes 2022 : Crimes of the Future, de David Cronenberg, présenté en compétition officielle, dissèque la sexualité du futur

Alors que l’espèce humaine s’adapte à un environnement de synthèse, le corps humain est l’objet de transformations et de mutations nouvelles. Avec la complicité de sa partenaire Caprice (Léa Seydoux), Saul Tenser (Viggo Mortensen), célèbre artiste performer, met en scène la métamorphose de ses organes dans des spectacles d’avant-garde. Timlin (Kristen Stewart), une enquêtrice du Bureau du Registre National des Organes, suit de près leurs pratiques. C’est alors qu’un groupe mystérieux se manifeste : ils veulent profiter de la notoriété de Saul pour révéler au monde la prochaine étape de l’évolution humain. Avec Crimes Of The Future, le cinéaste canadien David Cronenberg va enchanter ses fans en exécutant un retour assumé à ses obsessions, développées avec délectation dans ses films précédents.

— Léa Seydoux, Viggo Mortensen et Kristen Stewart – Crimes of the Future
© Nikos Nikolopoulos

La projection du film était très attendue et les rumeurs allaient bon train : film gore, trash, avec ablation d’organes à vif. Les spectateurs n’ont pas été déçus du voyage dans le futur proposé David Cronenberg. Le film s’ouvre sur un bord de mer en Grèce (il fallait justifier la participation de la Grèce à la production du film) où un jeune garçon s’amuse sur les galets. Sa mère l’interpelle en le priant de ne pas manger tout ce qu’il trouve. Dans la scène suivante, les spectateurs retrouvent le jeune Brecken se brossant les dents – un spectacle attendrissant- puis se baissant sous le lavabo pour manger avec contentement une poubelle en plastique alors qu’une bave acide envahit sa bouche. Il faut humblement avouer que cette scène impliquant un enfant « plastiquivore » bavant une sorte d’écume nous a quelque peu soulever le cœur et fait songer à la jeune fille possédée de L’exorciste. La mère de Brecken ne supportant plus cet enfant pas comme les autres, elle l’élimine en l’étouffant avec un oreiller.

Après ce prologue qui secoue le public, David Cronenberg présente le tandem de choc d’artistes perforées qui va accaparer notre attention : une sorte de matrice géante, accroché à des fils qui s’apparentent à des cordons ombilicaux, se balance. Une jeune femme, Caprice arrête les mouvements de la matrice qui sert de lit à Saul Tenser, joué par un Viggo Mortensen qui n’a pas eu peur de mettre à mal sa personne dans des situations parfois grotesques, par exemple quand il doit s’alimenter : David Cronenberg lui inflige d’être assis sur une chaise de dentiste qui se balance constamment alors que des bras mécaniques lui donnent à manger tel un bébé. Vous vous doutez qu’il peine à se nourrir dans de telles conditions. Saul Tenser a développé une incroyable et étrange capacité à créer de nouveaux organes internes. Le corps semble s’adapter à l’évolution de la planète, offrant la possibilité aux êtres humains de manger les plastiques qui abondent. Voilà ici peut-être le seul élément de Crimes Of The Future qui proposait une réflexion sur l’évolution de la planète et de l’humanité par rapport à la pollution par les plastiques.

Avec son dernier film, David Cronenberg cherche à démontrer quelle peut être la prochaine étape de l’évolution humaine. À chaque fois qu’un nouvel organe se développe dans le corps de Saul Tenser, sa partenaire de performance, Caprice, le tatoue alors qu’il est encore dans son abdomen, puis le lui coupe devant un public avide de sensations fortes et reconnaissant de partager ces ablations d’organes en direct,  savamment orchestrées de manière artistique.
Le propos de David Cronenberg va plus loin : la chirurgie est devenue la nouvelle sexualité. Alors que Caprice dirige les mains mécaniques qui ouvre l’abdomen de Saul et fouille dans les organes pour en extraire celui souhaité, cet acte chirurgical déclenche un intense orgasme chez elle. Plus tard, Caprice s’agenouille devant le torse de Saul pour lécher goulument la nouvelle cicatrice en crucifixion qu’il porte suite à l’intervention d’un médecin fou … Une fellation des nouveaux temps !

D’aucuns ont trouvé le film de David Cronenberg d’une extrême sensualité, nous vous laisserons juger par vous-mêmes. Seule certitude : Crimes Of The Future n’atteint pas les coups d’éclat de nombreux films du cinéaste.

À l’issue de la projection de presse, ni huées ni applaudissements !

Firouz E. Pillet, Cannes

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Firouz Pillet

Journaliste RP / Journalist (basée/based Genève)

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