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Cannes 2023 : Jeanne du Barry, réalisé par Maïwenn, fait l’ouverture de la 76ème ouverture du film de Cannes : « Much Ado about Nothing ! »

Jeanne du Barry, réalisé par Maïwenn, a fait l’ouverture du Festival de Cannes ce 16 mai et marque le grand retour à l’écran de Johnny Depp. Sortant simultanément dans les salles obscures, le film de l’actrice-réalisatrice qui tient le rôle-titre a fait couler tant d’encre depuis des mois que les diverses polémiques qui entourent ce film lui ont fait un joli coup de publicité.

Jeanne du Barry de Maïwenn
Image courtoisie Festival de Cannes

En effet, début avril, les organisateurs du festival nous ont appris que Jeanne du Barry avait les honneurs – on est à la cour ! – d’être le film d’ouverture de l’édition 2023 du Festival de Cannes. Une décision qui a déçu d’aucuns sans vraiment créer la surprise tant Maïwenn est une habituée de la Croisette : rappelez-vous ! Son film Mon Roi (2015) – sur le même sujet que l’excellent film de Valérie Donzelli, L’amour et les forêts, que l’on vous recommande vivement ! – était en compétition pour la Palme d’Or en 2015, après l’obtention du Prix du Jury en 2011 pour l’immense succès Polisse.

Pour son sixième long métrage, après le refus d’un comédien français, Maïwenn avait choisi Johnny Depp pour jouer Louis XV dans son film d’époque en costumes. Rien de surprenant pour Maïwenn qui excelle dans la provocation et dans l’art de se faire détester !

Pour rappel, le dernier rôle de Johnny Depp était, il y a trois ans, dans Minamata (2020). L’acteur y interprétait W. Eugene Smith, le grand photojournaliste du magazine Life. Ce biopic n’avait eu le droit qu’à une distribution très limitée à travers le monde et n’était même pas sorti dans les salles européennes, conséquences du feuilleton judiciaire très médiatisé qui a opposé l’acteur à son ancienne épouse Amber Heard.

Comment son intérêt pour la vie, l’ascension et la chute de la favorite du roi Louis XV – dont le nom est passé à la postérité pour une fameuse sauce gastronomique – est-il né ?

C’est en 2006 que Maïwenn a vu Marie-Antoinette de Sofia Coppola et a immédiatement été fascinée par le personnage de Jeanne du Barry, campée par Asia Argento. Voilà qui est fort bien mais il y a des passions que l’on doit savoir garder pour soi !

Maïwenn s’essaie donc au film d’époque et l’exercice s’avère périlleux : l’actrice-réalisatrice y dépeint une Jeanne du Barry facétieuse, moderne certes mais provocatrice (tiens, tiens !) qu’elle se complaît voluptueusement à incarner. Dès les premières séquences, la lenteur de la narration demande un effort au public qui doit s’y habituer : était-ce pour retranscrire le protocole de Versailles ? Stéphane Bern y parvient sans nous ennuyer !

Les puristes, ou tout simplement les amoureux de la langue de Molière, s’indignent, car, si un immense effort est porté sur les costumes et sur les perruques souvent démesurément ridicules (Ah, pauvre Pierre Richard et pauvre Noémie Lvovsky !), la langue est terriblement malmenée. Diantre, qu’on est fort loin de l’esprit du XVIIIème siècle et de sa langue raffinée ! Maïwenn insiste sur la stigmatisation de cette femme particulièrement libre, effrontée, libérée compte tenu de ses origines que la cour lui rappelle sans répit et de l’époque, mais ce portrait – on pourrait le qualifier de biopic – élude sciemment la face sombre de la cour de Versailles dont on connaît le sort futur.

— Maïwenn et Johnny Depp – Jeanne du Barry
Image courtoisie Festival de Cannes

Au fil des séquences, on s’interroge : pourquoi un acteur hollywoodien pour incarner un roi de France ? Son accent n’apparaît que dans ses quelques maigres répliques pour ce roi absolu qui semble ici plus pantomime, voire mutique que royal. Certes, le langage non verbal ou l’expression des yeux doivent suffire au roi de France pour s’exprimer mais nous laissent dubitatifs et affectent sérieusement la crédibilité de cette fiction. Difficile alors de ne pas voir dans ce choix de comédien un choix plus personnel… L’amour sauve le roi ! Vive le roi !

Portée par le seul nom de Johnny Depp (à nouveau bankable ?) et par la folie médiatique de son procès, la promotion de ce film d’époque s’est faite d’elle-même.

Certains de nos homologues ne tarissent pas d’éloges au sujet de ce dernier film de Maïwen … Le bien nommé Kenneth Brannagh, tant inspiré par Shakespeare, déclamerait : « Much Ado about Nothing ! ».

En effet, « Beaucoup de bruit pour rien » !

Firouz E. Pillet, Cannes

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Firouz Pillet

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