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Mostra 2020 : la Lithuanie concourt dans la section Orizzonti avec The Flood won’t Come de Marat Sargsyan

L’Institut Lituanien de la Culture et le Centre du Film Lituanien au 77e Festival du Film de Venise avec Places (Orizzonti) et The Flood won’t Come (Le déluge ne viendra pas) de Marat Sargsyan.

Le film s’ouvre sur une vie panoramique de renforts alpins … On croirait survoler l’Himalaya. La caméra axée sur l’écran bleu ciel ou le bleu du ciel s’approche progressivement, lentement. Le ciel bleu et lumineux cède sa place à une sorte de yourte cachée dans les flancs enneigés. A l’intérieur de l’antre au décors austère et épuré, un homme âgé, agenouillé, peint des calligraphies sur de grandes feuilles, aux côtés d’un bonzaï. Ce vieux moine japonais se lève de sa planche de travail pour nous rappeler :

Tout le monde savait que la guerre était terminé mais ils ont quand même choisi de lâcher la bombe.

La séquence suivante révèle l’effroi et la désolait de bâtisses bombardées, en flammes puis laissent deviner des silhouettes de soldats, portant leurs mitraillettes, marchant dans l’obscurité. Puis les soldats pénètrent dans les maisons, s’éclairant à la lampe torche. Ils découvrent une mère avec ses deux jeunes fils. Ils exigent qu’elle leur cède ses fils; la mère refuse et un des soldats donne l’ordre de tuer les deux garçons : cette exécution est interrompue par une déflagration.

Le ton est donné et laisse supposer que la guerre a éclaté dans le pays où la caméra de Marat Sargsyan entraîne les spectateurs.. Dès lors, il faut assembler les hommes, peu importe leur âge, et trouver des armes … Peut-être que quelqu’un en les donnera.

S’ensuivent le pillage des maisons, les sirènes qui retentissent, les patrouilles qui fouillent les demeures abandonnées pour y dénicher des vivres à départir aux troupes … Le chef donne l’ordre d’égorger des troupeaux de moutons.

Dans ce pays en guerre, le Colonel est un vrai professionnel, il a déjà fait des guerres sur ordre, ou pour faire de l’ordre, à maintes reprises et dans de nombreux pays.

Mais maintenant, ses partisans ont grandi et ont commencé une guerre dans son pays. Il ne veut pas, mais il doit se battre. Il a vieilli et est lassé de la guerre.

Il veut juste s’asseoir à table devant une assiette fumante de savoureuses côtes levées et regarder paisiblement l’écran de télévision, pendant que les nouvelles sont diffusées et que le présentateur annonce que la guerre a commencé.

L’axe du film tourne autour d’un célèbre militaire professionnel, point d’ancrage de l’intrigue. Dans une mise en abîme déconcertante, après avoir combattu et consulté dans divers régimes militaires toute sa vie, il se retrouve dans une situation ambiguë. Sa patrie est déchirée par une guerre civile et il devient colonel sur l’un des côtés en guerre. L’homme endurci par la poudre à canon et le sang voyant les massacres inutiles dans son propre pays.

Ainsi, ce colonel célèbre, qui a agi en tant que consultant de guerre dans différents pays pendant de nombreuses années, se trouve maintenant dans une situation étrange : lorsque la guerre civile éclate dans son pays natal, il devient un colonel combattant pour l’une des parties. Constatant l’absurdité des conflits qui lézardent le monde, il se soucie de l’espoir …Du moins, il essaie de s’en souvenir.

Marat Sargsyan choisit d’immerger ses spectateurs au cœur du conflit : dans l’attroupement de soldats qui se battent, torse nu, pour le plaisir; quand il dépouille et déshabillé un jeune homme, lui faisant croire qu’ils vont l’éliminer puis le laisser nu, au milieu de la forêt. Mais quand les soldats se déchaînent sur des animaux et le staffassent, ils filment la scène avec leurs téléphones portables : il s’agit bien d’une guerre contemporaine.

La guerre est devenue la décoration obligatoire des récits de la presse moderne. Au-dessus des champs sont suspendus des caméras qui transmettent les nouvelles aux différents foyers. Au cœur du conflit, il demeure un soupçon d’humanité : les soldats préparent du poisson et chacun suggère une épice : un peu de poudre vert, du paprika, etc. Puis, une fois repus, les soldats entament des chansons, accompagné par l’un des leurs à la guitare.

Dans The Flood won’t come, les événements présentés ne sont pas liés à une période précise ni à un pays ou à un conflit militaire spécifique. La guerre est l’arrière-plan dans lequel se posent les questions sur l’humanité et de la fragilité de la vie humaine, le souhait individuel dans son impuissance, ainsi que de nombreuses autres questions.

Marat Sargsyan laisse suggérer que les êtres humains sont devenus des moutons, bernés par les décideurs.

Ayant compris que la guerre est alimentée par des mains étrangères, il comprend son impuissance. Une vérité brutalement assénée qui, malheureusement, s’applique à de nombreux conflits contemporains ! La seule chose que le colonel puisse changer est le nombre de victimes des deux côtés. Ne suivant pas les ordres, le colonel essaie de réduire le nombre d’actions militaires dangereuses pour protéger les soldats, mais il devient bientôt lui-même suspect. Le drone qui observe les événements d’en haut – et qui permet d’admirer des vues spectaculaires – suit le sort du colonel. Peut-être que c’est l’espion de l’un des camps en guerre, ou peut-être que c’est la caméra de presse curieuse, peut-être que c’est l’œil qui voit tout tel un démiurge. Libre aux spectateurs de comprendre ce qu’ils souhaitent !

Firouz E. Pillet

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Firouz Pillet

Journaliste RP / Journalist (basée/based Genève)

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