Cinéma / KinoCulture / Kultur

Resilient Man : l’appel de Terpsichore plus fort que la douleur ! Rencontre avec le réalisateur et le danseur étoile protagoniste de son documentaire

La caméra de Stéphane Carrel suit le talentueux danseur étoile Steven McRae, gravement blessé au tendon d’Achille, dans son travail assidu de reconstruction.

Resilient Man de Stéphane Carrel
Image courtoisie Filmcoopi Zurich

Au sommet de sa gloire, en 2019, Steven McRae, brillant danseur étoile au Royal Ballet de Londres, se blesse au tendon d’Achille et s’effondre sur scène durant la représentation de Manon… C’est un autre danseur qui prend le relais et termine la représentation.

La carrière du danseur semble finie et le rideau paraît être définitivement tombé, tel un couperet, pour l’Australien Steven McRae qui n’a que trente-quatre ans. Une fois opéré et immobilisé durant une parenthèse qui lui paraît interminable, il réapprend à se muscler, à marcher, à se mouvoir, à s’élancer et à sauter… Et surtout, à savoir attendre et patienter ! Au fur et à mesure des séances de rééducation et de travail acharné, le danseur étoile croit en un possible retour.

Grâce au documentaire de Stéphane Carrel, le public découvre le danseur côté scène comme côté ville : le cinéaste a su se faire discret tout en étant présent dans la sphère privée du danseur, dans son intimité avec son épouse, Elisabeth Harrod, elle aussi soliste au Royal Opera House de Londres, et leurs trois enfants.

Après deux ans d’absence, accompagné par ses entraîneurs, ses professeurs, ses physiothérapeutes et l’équipe médicale de la compagnie, il suit un programme spécial pour revenir à son plus haut niveau. Malgré l’adversité, et faisant preuve d’une immense volonté et d’un immense surpassement de soi, Steven McRae compte bien remonter sur scène et danser à nouveau les plus prestigieux rôles du répertoire. Tel le Sphinx qui renaît de ses cendres, la fameuse étoile aux possibilités techniques remarquables semble pouvoir revenir sur les planches.

Auteur-réalisateur de documentaires pour la télévision, Stéphane Carrel a choisi, pour son premier documentaire destiné au cinéma, de filmer la renaissance remarquable de Steven McRae. Le cinéaste français conjugue son travail et sa passion pour la culture, le cinéma, la danse, son goût très prononcé pour la photographie en effectuant un travail minutieux sur les cadrages, mettant toujours en valeur l’être humain au cœur de chaque œuvre. Se définissant comme un portraitiste qui, à travers les histoires qu’il filme lui-même, cherche à montrer des hommes et des femmes passionnés qui font avancer le monde. Il réalise avec Resilient Man un portrait de Steven McRae dans la réalité méconnue, et souvent occultée de la blessure et de la souffrance, mais toujours entouré par son principal et inconditionnel soutien : sa femme.

Le rapport à la distance est volontairement amoindri dans ce documentaire, tant la caméra de Stéphane Carrel est présente à des moments intimes qui placent le public en tant que témoin privilégié de la rééducation du danseur et des nombreux sacrifices concédés. Accompagnant le danseur dans les étapes successives de sa rééducation, le public est à ses côtés tout au long du film. On fait la rencontre avec Steven McRae dans un lit deux places alors qu’il s’éveille et s’étire seul dans l’immensité des draps. On ne sait encore rien de sa vie privée. Puis, on le suit sous la douche alors que les gouttes d’eau ruissellent sur son visage et il nous vient alors à l’esprit que la présentation du danseur est un brin narcissique, mais on oublie rapidement ce détail devant un tel talent.

— Steven McRae – Resilient Man
Image courtoisie Filmcoopi Zurich

Ainsi, Stéphane Carrel choisit de filmer les conversations entre Steven et son épouse, l’annonce du lourd diagnostic, les pompes que le danseur fait alors que ses trois enfants sont assis sur le dos de leur paternel (séquence filmée par le danseur durant le confinement, le cinéaste n’étant pas autorisé à se rendre chez lui). Cependant, malgré cette intimité qui nous est dévoilée, le réalisateur met l’accent sur la performance sportive, le surpassement de soi et l’abnégation, en laissant poindre ponctuellement le rôle fondamental de la femme derrière l’homme.

Soignant les cadrages et peaufinant la photographie, Stéphane Carrel livre des images superbes, picturales qui magnifient la puissance corporelle alliée à la grâce de ce danseur qui produit des mouvements qui paraissent au-delà du possible, ainsi que son triomphal retour sur la scène du Royal Opera House en 2021.

Présents en Suisse romande à l’occasion des avant-premières de Resilient Man, Stéphane Carrel et Steven McRae nous ont parlé, séparément pour des raisons linguistiques, de leur rencontre et de leur travail ensemble. Rencontre.

Stéphane Carrel

 

Steven McRae en anglais

 

Firouz E. Pillet

j:mag Tous droits réservés

Firouz Pillet

Journaliste RP / Journalist (basée/based Genève)

Firouz Pillet has 1058 posts and counting. See all posts by Firouz Pillet

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*