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Sortie romande de la Dernière reine, film épique flambloyant algérien d’Adila Bendimerad et Damien Ounouri

Nous reproduisons ici la critique de Malik Berkati du 4 mai 2023.

La 14e édition du festival de films issus des cinémas arabes, ALFILM de Berlin, a révélé une génération de réalisatrices et réalisateurs qui n’ont pas peur d’affirmer leur point du vue – sur le monde, sur le cinéma, sur l’Histoire. À côté d’un cinéma traditionnel, les films de genre – thriller, fantastique, comédie – se multiplient pour aborder les réalités socio-politiques. Adila Bendimerad et Damien Ounouri ont pris le parti audacieux de se lancer dans la fiction historique, genre quasi inexistant dans l’espace cinématographique arabe. Bien leur en a pris ! Cette tragédie algérienne déclinée dans les cinq actes de la tragédie grecque, ébouriffe par sa mise en scène spectaculaire, une reconstitution minutieuse des costumes et des décors in situ – le film n’a pas été tourné en studio mais dans différents lieux d’Alger et de Tlemcem – et cette ambition romanesque qui traverse le scénario.

— Dali Benssalah – La Dernière reine
Image courtoisie Taj Intaj

Dès les premières images, on est embarqué∙es dans ce drame qui propose, à travers le destin tragique de la reine Zaphira (Adila Bendimerad), figure légendaire, une représentation de l’épisode historique de 1516 lors duquel le corsaire Aroudj Barberousse (Dali Benssalah) libère Alger du joug espagnol. La photographie de Shadi Chaaban sublime les lumières, les scènes de batailles quasi picturales, les tissus, sans pour autant verser dans l’orientalisme crasse, restant toujours du côté du récit qu’elle sert par le sous-texte historique et politique exprimé visuellement.
Allié au sultan Salim Toumi (Mohamed Tahar Zaoui), Barberousse ne veut pas se contenter de sa victoire et continuer son chemin vers d’autres défis comme il l’a toujours fait jusque là. Il veut devenir le roi d’Alger. La première épouse, Chegga (Imen Noel), sent le danger qui rôde, conseillère politique de l’ombre, elle met en garde le sultan. Lorsque le drame survient, la seconde épouse, Zaphira, jusque-là peu intéressée par les enjeux politiques, va s’opposer avec force et dignité à Barberousse.

L’écriture des personnages est intelligente, chacun∙e y a sa part d’ombre transcendée par sa part lumineuse et, si à une lecture rapide du synopsis on pourrait croire que Barberousse est au centre du film, ce sont bel et bien les figures féminines qui en sont l’essence : la première reine Chegga la politicienne, la dernière reine Zaphira la résistante et Astrid la Scandinave (Nadia Tereszkiewicz), compagne et conseillère de Barberousse. Les actrices et acteurs, dirigé∙es au cordeau, donnent, avec abnégation, chair, sang et vraisemblance à des personnages hauts en couleur, à la fois historiques et légendaires.

Une superproduction algérienne, à voir sur un grand écran, qui conquiert un large public depuis sa sortie en France, autant étonné par cette histoire, par cette déclaration d’amour à Alger que par le fait qu’elle soit l’ouvrage de deux cinéastes algérien∙nes – on attend leurs prochaines œuvres avec impatience !

Le film sort ce mercredi sur les écrans romands et sera projeté au le 16 juin FIFOG 2023 en présence du réalisateur.

Lire l’entretien que le co-réalisateur Damien Ounouri a accordé à Malik Berkati lors duFestival International du Film Arabe de Berlin (ALFILM).

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