[Audio] Rencontre au Festival du film français d’Helvétie avec Marie-Castille Mention-Schaar pour son film, A Good Man
A Good Man, de Marie-Castille Mention-Schaar, s’inspire d’une histoire vraie pour livrer une histoire d’amour qui brave les jugements et les préjugés.
Le film, qui faisait partie de la Sélection Officielle de Cannes 2020, suit l’histoire d’amour d’Aude (Soko) et de Benjamin (Noémie Merlant) qui s’aiment depuis six ans et vivent ensemble sur la petite île bretonne de Groix. Aude souffre de ne pas pouvoir avoir d’enfant alors Benjamin, qui n’a pas encore terminé sa transition, décide que c’est lui qui portera leur enfant.
« Tu me poses des questions, je n’ai pas les réponses. Je ne sais pas où on va, moi non plus. Je ne sais pas comment les gens vont réagir, pas comment moi je vais réagir. »
À travers leurs échanges, on cerne que le couple se laisse porter par leur amour, invincible, plus fort que tout, se sentant suffisamment solides pour affronter le regard des autres, surtout de leurs proches.
Benjamin et Aude s’aiment et vivent heureux car ils ont déjà traversé ensemble de multiples épreuves tout au long de la transition de Ben, mais c’est dans une aventure totalement inconnue qu’ils s’engagent maintenant puisque leur seule solution pour avoir un enfant le plus naturellement possible est que ce soit Benjamin (autrefois prénommée Sarah et qui est un homme transsexuel encore en transition) qui le porte.
Dès le début du film, Marie-Castille Mention Schaar – dont le second prénom vient d’un rêve qu’a fait la mère de la cinéaste – indique que son histoire est inspirée de faits réels et le générique de fin nous indiquera que le film est dédié aux enfants de la réalisatrice – sa fille de vingt-sept ans et son fils de dix-huit ans – et à Jacob Hunt, un homme transsexuel qui s’était questionné quand sa compagne ne souhaitait pas porter leur enfant redoutant la grossesse.
S’étant abondamment informée sur le sujet, en particulier aux États-Unis où les hommes transsexuels sont nombreux à porter l’enfant du couple, Marie-Castille Mention-Schaar réussit avec délicatesse et pudeur à aborder un sujet encore méconnu et mal perçu par notre société, se questionnant elle-même et interrogeant les spectateurs sur la relation avec la mère, sur la transidentité encore perçue comme un jeu ou comme un choix de sexualité et non de genre, sur la parentalité plus que sur la maternité.
Genres, identités, parentalité, acceptation des autres, regard de la société : A Good Man aborde avec subtilité toutes ces questions et montre que les préjugés et les réactions réfractaires ne proviennent pas forcément des anciennes générations. Bien au contraire !
En portant sur grand écran le symbole ultime de la féminité via un homme enceint, le film de Marie-Castille Mention-Schaar sort sur les écrans romands alors que les votations du 26 septembre invitent les Helvètes à se prononcer sur le mariage pour tous.
Grâce à un excellent scénario, écrit à quatre mains par la réalisatrice avec Christian Sonderegger, qui avait consacré son documentaire Coby à son demi-frère Jacob Hunt, Maire-Castille Mention-Schaar réussit à restituer une magnifique histoire d’amour, aux multiples interrogations tant personnelles que sociétales, magnifiquement incarnée à l’écran par Soko et Noémie Merlant dont la prestation mériterait un César.
Lors de sa venue au FFFH, Marie-Castille Mention-Schaar nous a parlé de son inspiration pour faire ce film, de ses recherches et de ses rencontres avec des hommes transsexuels ayant enfanté, du choix de ses comédiennes pour incarner le couple, des attaques que son film a reçues de la part d’un jeune acteur trans qui s’indignait sur les réseaux sociaux du choix d’une comédienne cisgenre, de son choix de Noémie Merlant pour le rôle de Benjamin, de l’accueil de son film par ses enfants et de ses propres questionnements sur la parentalité.
Firouz E. Pillet
© j:mag Tous droits réservés