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Cannes 2024 : C’est pas moi, de Leos Carax, présenté à Cannes Premières, invite à suivre les réflexions du cinéaste dans un court métrage introspectif

Dans son nouveau film, sous format libre et réparti en plusieurs chapitres, le cinéaste français parvient à dire beaucoup de choses dans un autoportrait, qui revisite plus de quarante ans de la filmographie de Leos Carax en questionnant les grandes questions de l’existence, de la sienne comme de celles de l’humanité.

C’est pas moi de Leos Carax
Image courtoisie Festival de Cannes

Ce samedi soir, Leos Carax a débarqué dans la salle Debussy du Palais des Festivals à l’occasion de la présentation de C’est pas moi. Presse et public avaient droit à une séance commune et étaient venus nombreux. Le cinéaste a surgi, sous des applaudissements nourris, coiffé d’un chapeau et portant des lunettes fumées. L’abondant public s’est aussitôt levé pour ovationner le cinéaste tel une rock star. Avançant d’un pas décidé dans l’allée centrale, accompagné de son complice de toujours, le comédien Denis Lavant, il portait la marionnette d’Annette.

À la lecture du synopsis, le film intrigue. Dès le premier chapitre, des titres, des inscriptions lumineuses couleurs fluo, annoncent le contenu des chapitres qui vont présenter et accompagner les réflexions du cinéaste. Leos Carax transcrit un échange avec les responsables du Centre Pompidou qui souhaitent connaître les avancées d’une exposition :

Où en êtes vous, Leos Carax ?

Il tente une réponse, pleine d’interrogations.

Je sais pas. Mais si je savais, je répondrais que…

Le mot est lâché ! Cette exposition dont un titre lumineux indique « work in progress » n’a finalement pas vu le jour.

Le musée avait demandé au cinéaste de répondre en images à la question : Où en êtes-vous, Leos Carax ?  Immédiatement, on songe au film de Jean-Luc Godard, Le Livre d’image (2018), en compétition officielle lors du Festival de Cannes.

De toute évidence, la suggestion du Centre Pompidou a inspiré le réalisateur qui livre ses pensées avec joie, humour, mais aussi mélancolie. Une séquence avec une jeune femme qui vide le contenu d’une boite de conserve dans laquelle se trouvait une vingtaine d’œufs rappelle certains films de Luis Buñuel laisse comprendre que les pères spirituels de Carax sont légion. Il est aussi question de l’enfance – la sienne et celle de sa fille – dans une déclinaison de la figure du père.

Les autres thèmes qui nourrissent les réflexions du cinéaste sont les victimes de la Shoah – le cinéaste a perdu la majeure partie de sa famille dans les camps ! – , l’amour, le cinéma, la musique. La guerre d’hier qui a décimé sa famille l’amène à réfléchir sur les guerres contemporaines dont celle qui sévit en Europe, saisissant les tremblements politiques de notre époque.

Puis Carax se remémore, par bribes, son parcours, son œuvre, ses comédien.ne.s, insérant de courts extraits de ses films. On y voit, bien évidemment, Denis Lavant, incarnant Monsieur Merde, Juliette Binoche en joggeuse. Quant au reste du casting de cet essai filmé, on y retrouve Adam Driver qui avait joué dans la comédie musicale romantique aux côtés de Marion Cotillard. Facétieux, Le cinéaste s’amuse aussi et nous sert un extrait de Bonne nuit les petits, l’émission télévisée d’animation pour la jeunesse, diffusée de la fin des années soixante jusqu’au début des années septante, avec Pimprenelle, Nicolas et Nounours. C’est l’occasion d’amener les marionnettistes qu’il a sollicités pour rendre un hommage à David Bowie : une marionnette à l’effigie du chanteur britannique court de profil sur la musique de Modern Love. Carax n’oublie personne parmi celles et ceux qui l’ont nourri et inspiré ! Brillantissime !

Lors de la conférence de presse du 11 avril dernier, Thierry Frémaux l’avait présenté en ces termes :

« C’est un essai autobiographique – ce n’est peut-être pas lui, c’est lui. C’est un véritable essai esthétique comme le ferait un écrivain ; un film assez court, très fulgurant, très brillant qui nous permet, deux ans après Annette, de voir revenir Leos Carax qui avait fait l’ouverture du festival en 2020. »

Samedi soir, alors que retentit la magnifique chanson Ya saken al aali de Fayrouz sur le générique de fin, le public a été séduit et l’a fait savoir au cinéaste en l’ovationnant longuement.

Firouz E. Pillet, Cannes

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Firouz Pillet

Journaliste RP / Journalist (basée/based Genève)

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