Filmar 2018 : Los fantasmas del Caribe, de Felipe Monroy, en compétition
Présenté lors du Festival Visions du réel, à Nyon, pour l’édition 2018, le long-métrage Los fantasmas del Caribe, du réalisateur colombien Felipe Monroy figure en compétition dans le programme du Festival Filmar.
Felipe Monroy a quitté son pays natal, la Colombie, à dix-huit ans et est arrivé en Suisse pour y rester et y étudier. Il entame des études au sein de l’HEAD, à Genève, et, étant illégal, doit travailler en faisant la plonge pour payer ses études. Il fait même un pacs pour obtenir des papiers de séjour mais son partenaire part avant l’obtention des papiers de Felipe. Le distributeur genevois José-Michel Bühler le prend sous sa protection en l’aidant à terminer ses études et en soutenant le projet de ce film.
Felipe Monroy revient en Colombie après dix ans d’absence. Il va se confronter à sa famille et à ses douloureux souvenirs dans un foyer qui, à l’image du pays, est empreint de violence. Sa mère, venue de la campagne pour travailler à Bogota, a passé sa vie à se rendre dans les quartiers huppés de la capitale pour limer les ongles des riches. Maltraitante et violente avec ses enfants, elle vit dans un total déni et passe ses journées à fredonner des chants de son église évangélique et à justifier avec des arguments incongrus son vote pour Uribe, « un homme exemplaire car bon époux et bon père de famille » pour cette femme restée seule avec ses enfants, abandonnée par son mari. Un mari toxicomane qui prenait les cadeaux que les enfants recevaient pour les troquer en bouffées de crack. Un mari qui a fini par vivre dans la rue puis est remonté dans la société en devenant chiffonnier.
Parallèlement à l’histoire familial du cinéaste qui fait à travers ce film une thérapies nécessaire, on comprend que son pays a engagé un processus de paix qui tente de mettre un terme à soixante ans de guerre. Le titre suggère une double problématique : Los fantasmas del Caribe fait allusion aux fantômes d’un lourd passé, tant familial que sociétal, un héritage qui a marqué les âmes, les esprits comme les corps. Le film de Felipe Monroy s’interroge sur un possible pardon et une renaissance des cendres : peut-on faire la paix avec sa propre histoire, se réconcilier et pardonner malgré les profondes blessures passées, à l’instar d’un pays entier qui a choisi d’effacer les rancœurs pour aller de l’avant et envisager un avenir serein.
Le réalisateur colombien poursuit avec ce nouveau film son travail sur la mémoire de son pays en revisitant le passé de sa famille, nourrie par une violence intrinsèque qui résonne avec celle d’une nation toute entière. Tout au long du film, des allusion à la Colombie et ses réalités – la guérilla, les assassinats, la floraison croissante des églises évangéliques – restent malheureusement anecdotiques au profit d’une thérapie familiale dont on comprend la nécessité existentielle. Cependant, on n’en vient à regretter que les problèmes de la Colombie ne soient que succinctement esquissés.
Adok Films, distributeur du film en Susse, ainsi que l’attachée de presse nous ont informés qu’il s’agit d’un premier volet d’un triptyque. On espère donc que les deux volets suivants seront un peu plus exhaustifs sur la Colombie, sa situation politique et sociologique, la ferveur des Colombiens pour ces nouvelles paroisses qui ont apporter une réponse à la désillusion du peuple face à l’Église catholique et qui jouent dorénavant un rôle fondamental dans la politique des pays d’Amérique latine comme les récentes élections l’ont démontré au Brésil.
Firouz E. Pillet
Le film sortira le 5 décembre sur les écrans romands. Plusieurs projections sont prévues en présence du réalisateur:
Avant-première dans la grande salle du cinéma Bio le 2.12.2018. Projection suivie d’un débat en présence du réalisateur, de Jean-Pierre Gontard et de l’ONG Genève Tiers-Monde
Mardi 4 décembre à 18h au Cinéma Rex, Fribourg
Mercredi 5 décembre au Zinéma, Lausanne*
Samedi 8 décembre aux Cinémas Rex ou Apollo, Neuchâtel (Passion Cinéma)*
Mercredi 12 décembre à 19h30 au Cinéma La Bobine, La Vallée de Joux (Ciné-Doc)
Jeudi 13 décembre à 19h30 au Cinéma Urba, Orbe (Ciné-Doc)
Vendredi 14 décembre à 20h au Cinéma d’Oron, Oron-la-ville (Ciné-Doc)
Samedi 15 décembre à 17h30 à l’AB, La Chaux-de-Fonds
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