Locarno 2023 : Sweet Dreams d’Ena Sendijarevic, un tournant dans la carrière de la réalisatrice
Avec Una Gunjak, qui vient d’obtenir une Mention spéciale dans la sélection Cinéastes du Présent pour son long métrage Excursion à la 76ème édition du Festival de Locarno, Ena Sendijarevic a représenté lors de la manifestation du cinéma d’auteur, le savoir-faire et surtout talent, des cinéastes issus de la diaspora bosnienne, avec Sweet Dreams en compétition internationale. Le film a remporté le Prix de la meilleure performance attribué à Renée Soutendijk.
Originaire de Odzak, une petite ville d’un peu plus de 21 000 d’habitants, situé dans le canton de Posavina, à l’extrême nord de la Fédération de Bosnie-Herzégovine, elle a fui durant son enfance le pays natal, causé par la guerre fratricide (1992-1996). La famille s’installe d’abord dans un petit village, au nord des Pays-Bas, mais l’ambitieuse jeune fille, accompagnée de sa sœur, a vite déménagé dans la capitale néerlandaise pour étudier le cinéma à l’Université d’Amsterdam. Avec une bourse de son pays d’adoption, Ena Sendijarevic s’inscrit à l’Université Libre de Berlin avant d’intégrer l’Académie néerlandaise du Film dont elle est diplômée en 2014. Un an avant la fin de ses études, elle réalise Reizigers in de Nacht et le court métrage Februari. En 2014, elle se présente avec un troisième court métrage intitulé Fernweh. Import, réalisé deux ans plus tard, qui a eu les honneurs d’une projection à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes. L’année suivante, le film a été candidat hollandais aux Oscars. Ena Sendijarevic est aussi auteure d’une mini-série néerlandaise intitulée Eng. La cinéaste a réalisé son premier long métrage, Take Me Somewhere Nice, présenté en 2019 au Toronto Film Festival.
Colonialisme devant les yeux du monde
Son deuxième long métrage, projeté à Locarno cette année sous le titre Sweet Dreams en compétition internationale, se déroule au début du siècle dernier, quelque part aux Indes. Il a été tourné à la Réunion avec le budget imposant de 3,5 millions d’euros. Sur 102 minutes, la cinéaste suit une famille indonésienne et hollandaise, centrée sur Jan interprété par Hans Dagelet et sa femme Agathe, incarné par la muse de Paul Verhoeven, la star hollandaise Renée Soutendijk. Propriétaires d’une plantation de canne à sucre, ils vivent dans l’insouciance, les derniers jours de l’ère coloniale sans s’en rendre compte. Mais Jan meurt terrassé par une crise cardiaque et son épouse appelle leur fils Cornelius pour le remplacer. Arrivé d’urgence avec sa femme Josefin, en fin de grossesse, inquiète de quitter l’Europe, l’héritier présente aux ouvriers ses plans du changement d’activités. Mais la découverte du testament de Jan avantage son deuxième fils, né hors mariage, aussi héritier de Sili, sa servante de longue date, ce qui change l’état des choses.
Sendijarevic souligne :
À travers ce film satirique d’époque, le portrait d’une famille néerlando-indonesienne qui tente de gérer son héritage, je voulais aborder l’histoire coloniale de l’Europe, comprendre comment le passé influence les relations de l’Europe occidentale, avec le reste du monde !
Ioanna Shars, responsable des ventes et des acquisitions d’Heretic Films indique :
L’approche tranchante d’Ena la place sans aucun doute parmi talents les plus éminents de sa génération. Il est merveilleux de soutenir une créatrice qui équilibre le social avec le divertissement et l’esthétique caractérielle, à travers un regard féminin unique et sans compromis !
Shars a accentué l’audace et sens de créativité de la cinéaste à qui il faut faire très attention.
Le producteur de Lemming Film, Eric Glijinis a ajouté:
Nous sommes très heureux de collaborer avec Heretic et de mettre ensemble sur le marché mondial Sweet Dreams, d’Ena Sendijarevic. Le film qui présente une forme acerbe de la réalité, examine de manière critique le passé colonial européen.
À côté de Glijinis et Léontine Petit de Lemming Film, les coproducteurs du film sont Erik Hemmendorff de Platform Prouktion, Kristine Börjeson de Fil I Vast, Martien Vlictman de VDRO et Mandy Marahimin de Tala Media.
Djenana Djana Mujadzic
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