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Mostra 2022 : Présenté dans la section Orizzonti, Ljuksemburg, Ljuksemburg, second long métrage d’Antonio Lukich, connaît sa première mondiale au Lido de Venise

Après son premier long métrage, My Thoughts Are Silent (2019), le réalisateur ukrainien Antonio Lukich aborde les thèmes de la gémellité, de l’absence paternelle et du deuil dans son second long métrage, Ljuksemburg, Ljuksemburg.
Kolya et Vasily apprennent que leur père, qui les a quittés lorsqu’ils étaient enfants, est en train de mourir au Luxembourg, loin d’eux. L’un d’eux veut aller retrouver son père, tandis que l’autre fait tout pour empêcher le premier de quitter le pays. L’un d’eux est policier et doit fréquemment enquêter sur les « coups d’éclat » du second qui est chauffeur de bus, qui houspille les passagers, les malmène, les brutalise. Alors que l’Ambassade d’Ukraine au Luxembourg les avertit que le père est moribond, ils décident de partir tous les deux au Luxembourg à la recherche de leur père : Kolya, le chauffeur de bus, le considère comme un héros, tandis que Vasily, le policier, le prend pour un scélérat.

Il y a beaucoup de beaux endroits pour mourir. D’après le synopsis, le Luxembourg n’en fait pas partie. Mais beau ou pas, le Duché du Luxembourg rend la mort très chère. Lorsque des frères jumeaux y arrivent pour y retrouver, leur père, longtemps absent,l’homme qu’ils trouveront sera-t-il le père dur à cuire dont ils se souviennent ?

Pour son second long métrage, Antonio Lukich a convoqué des jumeaux puisque les rôles principaux dans le film sont tenus par les membres du groupe de musique Kurgan & Agregat – les frères jumeaux Ramil et Amil Nasirov – et le directeur artistique est Andrey Lidagovsky, qui a joué le protagoniste du premier long métrage de Lukich. Antonio Lukich précise les sources d’inspirations à l’origine de son film :

« Mon père est décédé en 2016 dans une riche ville européenne. Je ne le connaissais pas bien et ne l’ai vu que quelques fois dans ma vie. Certains disent qu’il était ami avec Antonio Banderas, qu’il connaissait personnellement Maradona et qu’il s’habillait en Prada. Bien sûr, nous ne voulons savoir que de bonnes choses sur nos parents. Comme il est douloureux pour chacun de nous d’admettre ses échecs et à la place de Prada de trouver des vêtements de sport usés et abîmés dans ses placards. Ljuksemburg, Ljuksemburg est ma déclaration d’amour à mon père, qui fuyait tout le temps. Que j’ai essayé de rattraper depuis si longtemps, espérant répondre à ma propre question : pourquoi sommes-nous si attirés par ceux qui nous fuient constamment ? »

Dans une esthétique très picturale, en particulier dans les scènes de thérapie aquatique que subit un des frères, Antonio Lukich fait une déclaration d’amour à son père méconnu et imaginé, mais aussi à son pays. Ljuksemburg, Ljuksemburg propose un portrait plus minimaliste de ses personnages, contrairement à son premier long métrage My Thoughts Are Silent. Les spectateurs qui ont vu le premier long métrage du réalisateur décéleront cependant quelques points communs avec ce second film, particulièrement dans le développement de la relation à la mère et dans son ton à l’humour décalé qui cache de réelles blessures.

À propos de la gémellité, Antonio Lukich souligne :

C’est un film sur des jumeaux : ils semblent être les mêmes, mais derrière la similitude extérieure se cache le fait que leurs mondes intérieurs sont complètement différents. Par conséquent, ils traitent leur père différemment. Je voulais souligner ce doute, qui a donné forme à la composante visuelle.

— Ramil et Amil Nasirov – Ljuksemburg, Ljuksemburg
Image courtoisie La Biennale di Venezia

Outre les thématiques abordées, le cinéaste s’est montré reconnaissant à la Mostra de Venise de sélectionner Ljuksemburg, Ljuksemburg, offrant ainsi une visibilité à la culture ukrainienne en général et à son cinéma en particulier :

« En temps de guerre, il n’est pas facile d’apprécier l’importance pour un film d’entrer dans le programme officiel d’un festival de premier plan comme Venise. Oui, c’est une petite victoire, car notre culture est reconnue. Nous avons fait ce film de façon désintéressée pour notre peuple, et nous rêvons que le plus grand nombre possible de nos gens puisse le regarder dans nos cinémas et ressentir l’émotion. Et les festivals sont un bon début pour ce voyage du film, qui finira par vivre sa propre vie, ce dont nous leur sommes très reconnaissants. En temps de paix, cela pouvait donner le vertige et rendre fier, mais maintenant, c’est une raison de se faire entendre, du moins dans le cercle de l’industrie cinématographique et des cinéphiles du monde entier. Nous écouterons le langage du cinéma passionnant et des sujets actuels, présents et futurs. »

Firouz E. Pillet, Venise

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Firouz Pillet

Journaliste RP / Journalist (basée/based Genève)

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