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Rencontre avec le photo-journaliste Lilian Héliot, auteur de l’exposition L’exil en Bosnie, qui dénonce les politiques migratoires

Le jeune et talentueux photo-journaliste Lilian Héliot a passé plusieurs semaines en Bosnie-Herzégovine dans le canton Una-Sana, près de la frontière croate. Il en a ramené d’extraordinaires photographies de migrants venus d’ailleurs, désirant se rendre en Europe occidentale, obligés de rester sur place plusieurs années à la marge de l’existence. Titulaire d’un master : Crises Interventions d’urgence et actions de développement, Héliot membre de l’agence Hans Lucas souligne que ce grand reportage sur les oubliées du droit, réalisé sans aucun financement, entre dans son travail initial sur l’exil. Il nous a confié les secrets de son intervention sur le terrain glissant d’un pays qui a été la scène ensanglantée, pendant quatre ans, du plus grand conflit européen de la fin du 20ème siècle. Son exposition L’exil en Bosnie, itinérante, a été présentée dans plusieurs lieux parisiens, au Jardin d’Agronomie tropicale et au festival des Tropikantes, au Café Social de Belleville, au Centre Panthéon- Sorbonne et aux Amarres.

— Exposition L’exil en Bosnie de Lilian Héliot
Image courtoisie Lilian Héliot

 

Rencontre :

Comment l’idée d’aller photographier les migrants en Bosnie a-t-elle mûri ? Ils sont partout, même sous les ponts parisiens, à Calais ?

J’ai été sensibilisé par le traitement des personnes exilées à Paris. Depuis plusieurs années maintenant les associations comme Utopia56 tirent la sonnette d’alarmes sur la responsabilité des pouvoirs publics quant aux conditions de vie des exilés. Ces associations sont aussi présentes à Calais. Comme je connaissais des gens qui s’y étaient rendus -que ce soit en tant que bénévole ou en tant que journaliste- j’ai préféré me tourner vers une zone ou la situation était peu, voire pas du tout évoquée en France. J’avais à cœur de montrer que les choix politiques faits en France, et plus largement dans les pays de l’UE, ont des conséquences très concrètes aux frontières de l’Europe. Bosnie – Calais, ce n’est que le continuum des politiques inhumaines mises en place depuis de longues années !

Pouvez-vous expliquer votre constatation de fossé « vite creusé avec la population locale ». Il est incroyable car plus d’un million de Bosniens et Bosniennes ont été obligés de quitter pour toujours leur terre natale, durant la guerre fratricide de 1992 à 1996 ?

Justement le destin des personnes qui passe par la Bosnie est très similaire à celui des Bosniens et des Bosniennes. Lorsque l’on arrive en Bosnie par la Croatie on est saisi par le poids que l’histoire sur ce pays où l’exode est encore massif chez les jeunes. Dans les premiers temps de la crise de l’accueil des personnes exilées, on m’a expliqué que la solidarité avait été massive au sein de la population. Dans le Canton d’Una Sana beaucoup de gens ont été très sensibles au sort des personnes qui n’avaient d’autre choix que celui de l’exil. En revanche, les décisions prises ont entraîné un enlisement de la situation. La Bosnie est devenue une zone tampon. Les locaux et les personnes exilées se sont vus abandonnés, les frustrations entraînées par la situation sont parfois être redirigées vers les mauvaises personnes. Toujours est-il que de nombreuses associations locales se battent encore pour venir en aide aux personnes exilées.

Avez-vous essayé d’en savoir un peu plus sur ce problème des migrants à Bruxelles, où à L’Élysée ? Photographier les décideurs qui installent durablement les réfugiés dans une situation sans issue possible ?

Il n’y pas vraiment besoin d’aller à Bruxelles ou à l’Élysée pour comprendre qui est responsable, de nombreuses associations et universitaires ont mis au jour la responsabilité des instances nationales et européennes dans cette « crise » migratoire qui dure depuis plusieurs années. De plus, les décideurs sont inaccessibles.

L’exposition a été présentée dans différents endroits de la capitale et a apparemment intéressé les Parisiens. Envisagez-vous la montrer ailleurs en Europe occidentale ou en Bosnie ?

Si j’en ai l’opportunité avec grand plaisir.

La qualité de votre travail est d’un haut niveau. Avez-vous un procédé particulier ? Quel est le secret de votre savoir-faire ?

Merci. Non rien de particulier, j’ai tenté de prendre le plus de temps possible pour que l’appareil ne soit que le prolongement des échanges que j’ai eus avec les personnes photographiées.

Djenana Djana Mujadzic

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Djenana Mujadzic

Rédactrice / Reporter (basée/based Paris)

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