Black Movie 2024 – Le Festival international de films indépendant de Genève fête ses 25 ans du 19 au 28 janvier
Dix sections pour 105 films provenant de 44 pays, voilà le programme de cette année-jubilé, avec un invité de marque, le cinéaste taïwanais Tsai Ming-Liang, qui présentera quelques-uns de ses films, offrira une masterclass (20 janvier aux Cinémas du Grüütli à 17h30) et une exposition inédite, Walker, qui sera visible au Commun.
Associée à une programmation d’une quinzaine de films taïwanais, avec une section dédiée, « Arrêt sur images taïwanaises », dont sept de Tsai Ming-Liang, l’exposition Walker est une première en Suisse. Le festival présente sur les deux étages du Commun, une sélection de cinq films de la série Walker, associée à une installation mêlant la captation de la performance The Monk from Tang Dynasty à une série de dessins et d’esquisses réalisés par Tsai Ming-Liang, le tout dans une scénographie imaginée spécialement par l’artiste. À voir jusqu’au 7 février 2024.
Ici deux articles sur l’œuvre de Tsai Ming-Liang : https://j-mag.ch/anatomie-de-la-solitude-les-films-de-tsai-ming-liang-au-cinema-arsenal-a-berlin/ et https://j-mag.ch/berlinale-2020-competition-rizi-days-de-tsai-ming-liang-ou-la-geographie-des-solitudes/
Arrêt sur images taïwanaises
Une rétrospective sélective de six films de Tsai Ming-Liang permet de découvrir des points de jonction avec son exposition ; son film Goodbye, Dragon Inn est l’occasion de se pencher sur un genre qui a eu son heure de gloire à Taïwan, le wuxia (films de sabre), dont le classique Dragon Inn et le pop et culte A City Called Dragon sont de magnifiques illustrations ; enfin, cinq films récents évoquent un thème cher au cinéaste : les errances familiales face au monde moderne, films accompagnés du chef-d’œuvre de Hou Hsiao-hsien The Time to Live and the Time to Die – chronique d’une famille dans les années 1950-60 inspirée par la propre histoire du réalisateur.
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Cinéma, ton univers impitoyable
Le cinéma est associé aux paillettes, aux stars, tapis rouges, salaires mirobolants, gloire et beauté… La face cachée de cette industrie est beaucoup moins glamour, mais a aussi inspiré les cinéastes ! Six films font découvrir les facettes plus prosaïques de la chaîne de production d’un film, du tournage à l’archivage. Cobweb plonge dans l’hystérie d’un tournage frappé par la censure coréenne des années 70 ; The Summer with Carmen mélange avec légèreté théories sur le cinéma et les questions existentielles ; Celluloid Underground fait quant à lui découvrir un fabuleux trésor cinématographique caché dans des caves à Téhéran ; enfin, Au cimetière de la pellicule accompagne la quête du premier film guinéen, sorti en 1953 mais aujourd’hui perdu. En lien avec ce dernier, Le Mandat et Hyènes, deux chefs-d’œuvre récemment restaurés, sont aussi programmés pour évoquer la complexe question de l’archivage.
Une table ronde autour de cette thématique et du film Le cimetière de la pellicule aura lieu le lundi 22 janvier à 18h30, à Fonction:Cinéma.
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Résiste !
Sept œuvres engagées déroulent des histoires de combats ou de luttes portés par des protagonistes seul·e·s contre tou·tes.
Le puissant film d’Elene Naveriani, qui nous avait déjà propulsé∙es avec son premier long métrage, Wet Sand, dans un cinéma qui allie des qualités purement cinématographiques avec une intention narrative affirmée, continue son exploration de la place de celles et ceux qui n’entrent pas dans le schéma traditionnel de la société géorgienne de l’arrière-pays, avec la magnifique et empoignant Blackbird Blackbird Blackberry, qui révèle une actrice hors norme, Eka Chavleishvili.
Le film sortira sur les écrans romands en avril (une critique et une longue interview à retrouver dans nos pages à cette occasion).
Cette section donne également l’occasion de voir le Léopard d’or du Festival de Locarno 2023, Critical Zone de l’Iranien Ali Ahmadzadeh, un film complètement éclaté dans lequel non seulement les protagonistes se retrouvent dans une zone critique, mais également les spectateur∙trices, catapulté∙es dans un univers horrifique qui ressemble autant à un cauchemar qu’à la réalité.
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Prendre racine
Venant du Mexique, du Brésil et d’Argentine, deux documentaires – La mujer de estrellas y montañas et The Buriti Flower – et une fiction immersive – Eureka – ouvrent des fenêtres sur les populations autochtones de ces pays souvent occultées dans le paysage médiatique. Tentant de faire survivre leur culture et leurs langues, ces peuples font entendre leur voix et s’organisent. Ou parfois disparaissent lentement dans le silence…
The Buriti Flower sortira prochainement sur les écrans romands (critique et interview à retrouver dans nos pages à cette occasion).
La table ronde Subaltern Stories, représenter les indigènes d’Amérique au cinéma aura lieu le jeudi 25 janvier à 18h30, Fonction:Cinéma.
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Bijou de famille
La question de la famille est une source inépuisable de questionnements, de points de vue, de créativité pour les artistes du monde entier. Le festival propose six documentaires et fictions qui dévoilent des histoires de familles dont la vie n’est pas un long fleuve tranquille : Al Djanat, Paradis originel narre un partage de biens rocambolesque et passionné ; Bauryna salu suit un enfant qui retrouve ses parents ; El castillo invite à un conte de fées moderne ; Evil Does Not Exist de Ryūsuke Hamaguchi place un père et sa fille au cœur d’une fable écologique ; une mère s’émancipe de sa condition de femme au foyer dans Ripples ; enfin, Toll casse tous les codes de la bienséance et de l’éducation !
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Sueur et tremblements
Depuis que le septième art existe, la pratique sportive a souvent attiré l’objectif des réalisateur·rices de documentaires et de fictions, et a été le sujet de plusieurs chefs-d’œuvre cinématographiques.
À l’occasion des Jeux olympiques d’été qui se tiendront en France en 2024, l’équipe de Black Movie s’est intéressée aux films de sport à travers le monde, en cherchant des points de vue insolites sur des épreuves populaires et en dénichant des disciplines inhabituelles. Sept films, du sumo au hockey sur gazon en passant par le basket (avec Slam Dunk, adaptation anime du célèbre manga éponyme par son auteur lui-même, Takehiko Inoue) et le football !
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Membres fantômes
Que se passe-t-il après la mort ? Les religions se sont toujours emparées de cette question et y répondent de manière très affirmative. Les artistes de tous horizons ont aussi leurs points de vue sur la question. Les quatre films de cette section invitent à suivre des fantômes ou des réincarnations : du Laos à Zanzibar (Samsara), du Népal (The Red Suitcase) au Maroc (La Mère de tous les mensonges) en passant par la Namibie (Under the Hanging Tree), ils dessinent les contours persistants de nos cher·ères disparu·es, qui sont bien plus proches qu’on ne le pense…
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L’odeur de l’argent
L’argent n’a pas d’odeur, dit le dicton. Les cinq films de cette section disent le contraire. Wang Bing revient avec un impressionnant portrait-fleuve d’une jeunesse qui travaille d’arrache-pied dans des ateliers de couture sans se départir de son énergie – Jeunesse (Le Printemps)[Lire la critique j:mag].
Dans Animal, les animateur·rices d’un hôtel balnéaire grec dansent et chantent pour amuser la galerie, mais si les vacanciers s’épanouissent dans ces instants arrachés à leurs quotidiens, les clowns tristes qui s’épuisent à leur redonner vitalité s’enfoncent dans une atmosphère aussi irrespirable que leur horizon bouché. Une vision implacable de la marchandisation et de l’artifice du tourisme de masse qui produit son lumpenproletariat dont personne ne veut prendre conscience.
En Centrafrique, un habitant ramasse du sable au fond de la rivière pour le vendre à un Chinois émigré qui gère des petits chantiers dans Eat Bitter ; Pierrette, Sisyphe camerounaise des temps modernes, gère son petit commerce de couture du mieux qu’elle peut (Mambar Pierrette) ; et le Roumain Radu Jude charge au vitriol un pays au bord du gouffre dans Do Not Expect Too Much from the End of the World. Le film a remporté le Prix spécial du jury du Festival de Locarno 2023 : lire la critique et l’entretien j:mag avec Radu Jude.
La table ronde Chinafrique : entre partenariat et néocolonialisme en présence de la réalisatrice d’Eat Bitter Pascale Appora-Gnekindy aura lieu le samedi 27 janvier à 17h30, à Fonction : Cinéma.
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Plaisirs coupables
Pour les aficionado·as des frissons, des sursauts et des sueurs froides, un thriller de Hong Kong qui fait la nique au destin (Mad Fate de Soi Cheang), un film anti-guerre brut et somptueux (Shadow of Fire de Shinya Tsukamoto) et les perles lascives et impudiques du Petit Black Movie pour adultes !
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Petit Black Movie
Composé de 40 films d’une trentaine de pays, le programme pour les petits cinéphiles entremêle des formes aussi exubérantes qu’affriolantes. Les films proposés révèlent la fragilité de la nature, et si la place de l’écologie et du respect des êtres vivants reste primordiale, la fête n’est pas délaissée pour autant. Pour preuve : un week-end consacré aux enfants durant lequel se succéderont projections passionnantes, ateliers créatifs et pauses gourmandes.
En guise de dessert, un ciné-concert mettra à l’honneur la poésie française dans le cadre majestueux du théâtre Les Salons.
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Malik Berkati
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