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Locarno 2018 – Menocchio d’Alberto Fasulo, en compétition internationale, a enthousiasmé la presse italienne

Menocchio du Frioul Alberto Fasulo, concourt en compétition au Festival de Locarno et était attendu avec impatience par la presse de la péninsule. La première mondiale du film relate l’histoire du meunier Domenico Scandella, de Montereale, qui a vécu dans la seconde moitié du XVIe siècle, affirmant des idées novatrices face aux préceptes rigides de l’Église catholique afin de défendre la liberté de pensée.

Ce film, auteuriste, aux tonalités très sombres, plonge les spectateurs dans l’Italie, à la fin du XVIème siècle. Sentant son hégémonie menacée par la Réforme protestante, l’Église catholique romaine lance la première guerre idéologique systématique par un État pour un contrôle total des consciences. Conçu dans ces années-là, le nouveau diktat confessionnel se transforme en un lieu pour les âmes malléables en un tribunal pour les esprits. L’écoute, l’espionnage et la dénonciation des voisins deviennent des pratiques obligatoires, les punitions étant l’excommunication, l’emprisonnement et surtout la menace de brûler en enfer post mortem.

 

Menocchio, un vieux meunier autodidacte, obstiné et têtu, considéré comme analphabète par les prélats de Rome mais doté d’une intelligence redoutable, remet en question les fondements de la Sainte Église catholique, distillant ses pensées dans un petit village abandonné au milieu des montagnes du Frioul. Menocchio pratique la charité, la solidarité prônées par le christianisme, donnant de la farine aux plus démunis mais, prêt à se sacrifier, décide de se rebeller. Recherché pour hérésie, il n’écoute pas ses amis et les membres de sa famille qui l’exhortent à être prudent et fait face au procès au lieu de s’échapper ou de se rétracter. Il n’est pas seulement fatigué des impostures du clergé, des abus, des taxes et des injustices. En tant qu’homme, Menocchio est véritablement convaincu qu’il est égal aux évêques, aux inquisiteurs et même au pape, au point qu’il espère, ressent et croit intérieurement pouvoir les reconvertir en un idéal de pauvreté et d’amour.

Le film Menocchio, dirigé par le cinéaste italien Alberto Fasulo, qui a remporté le Marc Aurèle d’Or avec Tir pour le meilleur film au Festival du Film de Rome, entre en compétition officielle ce samedi dans la compétition principale – concorso internazionale – du Festival international du film de Locarno. Le film, produit par Nefertiti Film avec Rai Cinema, co produit par Hai Hui Entertainment (Roumanie), a remporté un suffrage unanime auprès de la presse italienne qui semblait acquise à la cause du cinéaste avant même le début de la projection.

— Marcello Martini – Menocchio
Image courtoisie du Festival international du Film de Locarno

Pourtant, le choix stylistique du réalisateur de filmer son protagoniste au plus près, insistant sur des premiers plans contemplatifs sur son visage, a un peu déçu les journalistes internationaux. On aurait souhaité peut-être plus de paysages si picturaux de la région Frioul-Vénétie.

Fasulo en est à son quatrième film tourné entre le Frioul et le Trentin en utilisant une petite équipe réduite au minimum et un casting d’acteurs non professionnels, sélectionnés par ses soins. Consacré à Domenico Scandella, appelé Menocchio, frioulan meunier de Montereale, qui a vécu entre 1532 et 1599, jugé et a été exécuté pour hérésie par l’Inquisition pour défendre la « sa liberté de pensée », le sujet du film aurait pu être intéressant mais la forme et le style narratif choisi ne présentent malheureusement aucune originalité.

L’histoire et le destin tragique de Menocchio ont été révélés grâce aux travaux de recherche de l’historien et essayiste Carlo Ginzburg, relatés dans le livre Il formaggio e vermi publié en 1976. L’inquisition a déjà été traitée au cinéma de manière beaucoup plus convaincante, par exemple dans l’excellent film La Controverse de Valladolid (1992), téléfilm réalisé par Jean-Daniel Verhaeghe, qui constitue un récit romancé de la véritable Controverse de Valladolid.

Cible manquée pour Alberto Fasulo : à Locarno, Menocchio n’a convaincu que les journalistes italiens !

De Locarno, Firouz E. Pillet

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Firouz Pillet

Journaliste RP / Journalist (basée/based Genève)

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