Mostra 2019 : Mes jours de gloire, premier film d’Antoine de Bary, est projeté dans la section Orizzonti
Adrien (Vincent Lacoste) est un Peter Pan moderne. A vingt-sept ans, il se comporte toujours comme un petit garçon immature et irresponsable. Quand il était enfant, il a connu un furtif succès en tant qu’acteur, mais cela fait maintenant plus de dix ans, et aujourd’hui Adrien n’a ni gloire ni argent.
La séquence d’ouverture montre Adrien attendant la venue des pompiers usr le trottoir en face de son immeuble. Il les appelés car, selon sa version, sa copine a laissé le gaz allumé. Mais, alors que les pompiers entrent dans l’immeuble, il escalade l’échelle posée contre la façade pour regagner son appartement … Il a en fait oublié ses clefs à l’intérieur et ne voulait pas payer les services d’un serrurier.
A force de ne pas payer ses factures et surtout de ne pas relever son courrier dont les mises en demeure de sa banque et de son bailleur, Adrien se voit interdit de carte bancaire et exproprié de son appartement. Il doit retourner vivre chez ses parents (Emmanuelle Devos et Christophe Lambert) qui vivent avec Robert, un grand chien aux poils longs, diabétique et gourmand, pour recommencer à zéro. Suspendu entre la possibilité d’une histoire d’amour et celle d’un retour en tant qu’acteur, Adrien reste nonchalant.
Pour son premier long métrage, Antoine de Bary brosse un portrait excentrique, parfois facétieux, mais émotionnellement étudié avec justesse, d’un jeune homme en plein malaise existentiel,.
Durant tout le film, les spectateurs suivent les errances émotionnelles, physiques et relationnelles d’Adrien qui se retrouve sans abri, étant hébergé alternativement chez un ami ou chez ses parents. Mais il découvre que le couple de ses parents bat de l’aile même si ces dernier ne lui ont rien dit : son père ivre et lâche, qui squatte la chambre de bonne pour soit-disant travailler (un Christophe Lambert à l’allure vieillie, qui joue un rôle un peu en demi-tons) et d’une mère psychothérapeute (Emmanuelle Devos, qui fricote avec un collègue et qui pose un diagnostic froid de l’anxiété castratrice d’Adrien.)
Dans le marasme de son existence oùrien ne semble aboutir, Adrien semble connaître quelques échappatoires grâce à la romance naissante avec Léa (Noée Abita, la découverte d’Ava de Léa Mysius), une adolescente qu’il rencontre au poste de police lorsqu’ils sont tous les deux convoqués. L’autre échappatoire est le rôle principal d’un biopic en atelier du jeune Charles de Gaulle : Adrien espère enfin voir ses problèmes financiers résolus grâce à ce rôle.
Mais le récit étant basé sur les errances existentielles d’Adrien, ses problèmes d’argent, son manque d’orientation et de décision, et surtout son dysfonctionnement érectile, on devine rapidement qu’Adrien n’est pas au bout de ses peines.
Antoine de Bary, présent à Venise avec Vincent Lacoste et Noée Abita, qui ont tous deux déclaré avoir été le plus naturel possible pour incarner leur rôle, a répondu aux questions du public en expliquant son personnage :
Quelle transformation pour devenir un homme ! Découvrir l’indépendance, le vertige des premiers pas et l’enthousiasme pour un nouveau monde. En tant que fils de psychologue, j’ai toujours pensé que j’avais une longueur d’avance sur mes pairs. Comme si le travail de ma mère pouvait me donner sagesse et maturité congénitale. Quelle déception au moment où j’ai fait mes premiers pas dans la vie adulte ! Pourtant, j’étais prêt pour l’existence, armé de théories familières et de schémas intellectuels prêts à l’emploi. Malheureusement, pour grandir, pour mûrir, il faut aussi se débarrasser de ces schémas. J’ai donc dû abandonner les croyances de mon enfance, trahir les principes maternels et faire toutes les erreurs d’un débutant. C’était le point de départ du film.
Adrien fonctionne de manière désuète; d’ailleurs, contrairement aux jeunes de sa génération, il n’utilise pas de téléphone portable, n’envoie pas de courriels. Il évolue dans un autre monde. Son salut viendra de sa mère qui lui transmet qu’elle aussi a connu des moments de doutes et d’échec mais elle le rassure : « On se relève. »
Firouz E. Pillet, Venise
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