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Palestine: Filmer C’est Exister (PFC’E) du 29 novembre au 3 décembre 2023 à Genève. Des Rencontres cinématographiques plus importantes que jamais !

Pour leur douzième édition, les Rencontres cinématographiques Palestine: Filmer C’est Exister (PFC’E) investiront à nouveau les cinémas Spoutnik et Grütli à Genève.

La séquence dans laquelle le monde a été précipité le 7 octobre 2023 avec l’incursion de combattants du Hamas dans le territoire israélien, faisant, selon le porte-parole du ministère des Affaires étrangères israélien, 1200 morts, en majorité des civils, et une estimation de 240 otages, dont à date, 39 ont été libérés dans le cadre de l’accord négocié par le Qatar, avec l’appui des États-Unis et de l’Égypte (19 otages étrangers, principalement des travailleur·seuses Thaïlandais·es, ont par ailleurs été libérés hors accord), en échange de 117 prisonnier·es palestinien·nes – des femmes et des adolescents, a ébranlé la planète entière qui s’était tragiquement accommodée ces dernières années d’un statut-quo médiatico-politique international alors que sur le terrain la situation empirait jour après jour. Cette politique de l’autruche s’est effroyablement fracassée sur le mur de la réalité. Pour « éradiquer le Hamas », selon les termes de Benjamin Netanyahu, Israël inflige depuis le 13 octobre 2023 une guerre sanglante à la bande de Gaza et ses 2,3 millions d’habitants, ayant fait, à date, près de 15 000 morts côté palestinien, dont 6140 enfants, selon le gouvernement du Hamas, dont de nombreux journalistes (à date une cinquantaine selon le Committee to Protect Journalists – CPJ), 108 employé·es de l’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient) à date du 21 novembre, ainsi que deux médecins de MSF.

Les images qui nous proviennent en ce moment de cette partie du monde racontent une partie de l’histoire. L’autre partie de l’histoire est occultée, censurée, empêchée. L’autre partie de l’histoire ne débute pas le 7 octobre 2023. Elle remonte à 75 ans et à la Nakba.
Cette histoire est racontée par tout le monde, selon ses propres biais – l’un des plus spectaculaires étant celui qui annihile le bon sens historique de l’Allemagne dans sa représentation de l’épisode historique en cours –, mais la parole palestinienne reste entravée, systématiquement suspectée de double, triple, quadruple discours, remise en cause dans la présentation des faits. Mais comme le suggère la formule éculée : les faits sont têtus. La Nakba, La Catastrophe, a bel et bien eu lieu, avec 700 000 Palestinien·nes contraint·es de quitter leur terre à partir du 14 mai 1948, date de la proclamation de l’État d’Israël. La Nakba s’est inscrite non seulement dans la mémoire collective des Palestinien·nes (les familles séparées, dispersées, la dénégation du droit au retour des réfugié·es et de leur descendance, inscrit dans la résolution 194 de l’Assemblée générale des Nations unies), mais dans le fait accompli de la colonisation qui n’a cessé de s’étendre depuis sept décennies. Une sourde colonisation, à rebours de la marche du monde et ses décolonisations, qui depuis la Seconde Intifada en 2000 grignote inéluctablement les Territoires occupés, au rythme des forces politiques de plus en plus extrémistes au pouvoir en Israël. Et la Nakba, présentement, c’est également le déplacement de 1,1 million de la population du nord de la bande de Gaza vers le sud, les bombardements massifs de Gaza City, les destructions d’habitations, d’hôpitaux, d’écoles, des infrastructures… la catastrophe décrite depuis le début de l’offensive par les Nations Unies : https://unric.org/fr/palestine-eviter-un-genocide-a-gaza-et-une-nouvelle-nakba/.

La nécessité de donner une voix aux Palestinien·nes est plus urgente que jamais. Ainsi qu’un espace pour projeter leurs images, celles du récit de leur quotidien, dans la peine comme dans la joie, sous occupation ou comme Palestinien·nes en Israël, comme réfugié·es ou émigré·es, images et voix qui n’épargnent pas le questionnement de leur propre société et dirigeants.
PFC’E a choisi cette année de projeter des films montrant des jeunes et leur obstination à reconstruire les projets anéantis par l’occupant et les colons sur leur terre. La moitié des films sélectionnés a été réalisée par de jeunes cinéastes, plusieurs d’entre eux·elles montrant la pression de la collectivité en Palestine occupée sur ce qui relève de l’intimité.
Pour celles et ceux qui ont des difficultés à concevoir les effets de la colonisation sur les psychés des colonisés, ceci depuis la plus tendre enfance, un film documentaire très simple, sans effets de manche, qui expose de manière implacable la nature insidieuse du poison de la colonisation : Sarura. The Future Is an Unknown Place de Nicola Zambelli (2022). Jeudi 30 novembre à 19h00 au Grütli – salle Simon (visioconférence avec Hamoudi, membre de « Youth of Sumud » en Cisjordanie et Budour Hassan, Amnesty International); une projection aura également lieu le samedi 2 décembre à 16h00 au Centre ABC à La Chaux-de-Fonds. Lire la critique j:mag.

Deux films abordent le thème de la mémoire et de l’oubli en Palestine occupée. Le premier, intitulé Twelve Beds, de Reine Mitri, explore les souvenirs de douze Palestiniens, placés en orphelinat dans les années 70 et qui retrouvent leur lieu d’enfance à Beyrouth. Ils partagent des souvenirs mêlés de douleur et de joie, évoquant leur quotidien, une éducation de qualité, et la construction de leur identité palestinienne (vendredi 1er décembre, 19h au Spoutnik, en visioconférence avec la réalisatrice et Mohammed El Arbid, chercheur palestinien ayant travaillé sur ce film). Le deuxième film est R21 AKA Restoring Solidarity, le nouveau documentaire de Mohanad Yaqubi, qui travaille à la préservation de l’héritage cinématographique palestinien. Ce film de montage présente des films japonais des années 60-80 sur le mouvement de solidarité nippon avec le peuple palestinien (samedi 2 décembre au Spoutnik, en présence du réalisateur).
Dans la veine de la mémoire, à noter un film de genre où le fantastique permet de livrer avec puissance du réel : A House in Jerusalem de Muayad Alayan. Le dimanche 3 décembre au Spoutnik (le réalisateur sera présent en visioconférence). Lire la critique j:mag.

Le festival fera un Focus sur le réalisateur Khaled Jarrar, qui sera à Genève avec deux films. Inflitrés (2012) qui suit des Palestinien·nes qui, malgré le risque de lourdes peines, tentent quotidiennement de passer de l’autre côté du Mur pour aller travailler ou voir un parent. Notes on Displacement (2022, Première suisse) qui suit Nadira, réfugiée depuis l’âge de 12 ans à Yarmouk suite à un premier exil lors de la Nakba de 1948 et qui, à cause de la guerre en Syrie, doit fuir à nouveau avec sa fille et son gendre vers l’Allemagne. Le film sera suivi d’une discussion en présence du réalisateur et d’autres invité.es. le jeudi 30 novembre à 21h00 au Grütli – salle Simon. Le film sera également projeté le samedi 2 décembre à 18h15 au Centre ABC à La Chaux-de-Fonds.

Notes on Displacement de Khaled Jarrar
Image courtoisie PFC’E

Au centre du festival, le cinéma Spoutnik, il y aura un buffet palestinien tous les soirs à partir de 18h30. Les organisatrices et organisateurs de ces rencontres cinématographiques font cet appel :

« Venez discuter, partager avec les cinéastes palestinien·nes invité·es ! »

Car quoi de mieux qu’un espace culturel pour faire connaissance, poser des questions, débattre ? Ces espaces culturels d’échanges qui se ratatinent un peu partout sous la pression, qui souvent s’adosse à l’absurde, de la censure (avec pour effet pervers l’induction de l’auto-censure). Trois exemples récents édifiants avec trois femmes censurées en Allemagne : l’annulation le 20 octobre de la remise publique du LiBeraturpreis 2023 à l’écrivaine palestinienne Adania Shibli pour son livre, basé sur un crime sexuel réel commis lors de la Nakba par des soldats israéliens, Un détail mineur (Éditions Sindbad/Actes Sud) à la Foire du livre de Francfort ainsi qu’une rencontre avec le public qui devait également se tenir à la Foire en présence de l’écrivaine et de son traducteur allemand, Günther Orth ; la première chaîne publique ARD a annulé la diffusion le 20 novembre de la comédie d’Annemarie Jacir, Wajib (2017, trois prix de jurys indépendants au festival de Locarmo 2017 et de nombreux prix par la suite) – la chaîne a justifié cette décision ainsi : « À la lumière des récents événements au Moyen-Orient, nous pensons qu’il n’est pas à sa place dans le programme en raison de sa perspective narrative », sachant que le film est une comédie dramatique qui relate les tensions entre un père et son fils, Palestiniens d’Israël !(film en vod ici); le Saarlandmuseum vient d’annuler une exposition de l’artiste juive Candice Breitz, prévue pour 2024, en raison de déclarations prétendument controversées sur la guerre de Gaza explique Monopol, le magazine Art et Lifestyle, qui a contacté l’artiste sud-africaine qui réfute les allégations émises par le quotidien TAZ.

Il apparaît ainsi que les espaces culturels doivent également être soutenus. À Genève, il sera donc possible de voir les films de la réalisatrice Mais Darwazah, des réalisateurs Khaled Jarrar, Mohanad Yaqubi, Saleh Saadi en leur présence, et par visioconférence Muayad Alayan, Ward Kayyal, Basil Khalil, Reine Mitri et Halim Mardawi.
Les 4 invité·es cinéastes palestinien·nes à Genève du 29 novembre au 3 décembre seront également présent·es lors de la soirée d’ouverture le mercredi 29 à 19h00 au Spoutnik, suivie de la projection du documentaire My Love Awaits Me by the Sea de Mais Darwazah.

Outre les courts métrages, les documentaires, les longs métrages et la table ronde, animée par Nicolas Wadimoff, avec les quatre cinéastes présent·es le dimanche 3 décembre à 17h30 au Spoutnik, le festival propose un concert en partenariat avec Le Groove, intitulé Hikayat Falastin. Le projet est divisé en deux parties, une exposition artistique suivie de concerts et DJ sets.

https://palestine-fce.ch

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