Berlinale 2019Cinéma / KinoCulture / Kultur

Berlinale 2019 – Compétition jour #7: Elisa y Marcela (Elisa & Marcela) d’Isabel Coixet – Quand l’esthétique étouffe l’artistique

Évacuons tout de suite la polémique qui entoure la présentation de ce film en compétition car produit par la plateforme de streaming Netflix: Dieter Kosslick avait indiqué lors de sa conférence de presse de présentation de cette 69e que pour la Berlinale, il suffisait qu’un film soit apte à être projeté au cinéma pour être sélectionné. Il se trouve également que le film sortira bel et bien dans les salles en Espagne. Bien que faisant partie de ceux qui ne soutiennent pas la présence de films produits par des plateformes de streaming dans les festivals, la position de la CICAE – Confédération internationale des cinémas d’art et d’essai – qui a protesté le 11 février (le festival a débuté le 7) dans un communiqué concernant la présence de ce film à Berlin, est on ne peut plus que tardive. Même si nous partageons ce point de vue, ce n’est pas 2 jours avant la projection du film qu’il fallait se manifester. La réalisatrice s’est emportée sur ce sujet lors de la conférence de presse, voir la ” quote of the day“.

— Greta Fernández, Natalia de Molina – Elisa y Marcela (Elisa & Marcela)
© Netflix

Isabel Coixet est une grande habituée du festival, avec 8 films présentés toutes sections confondues, dont Nadie quiere la noche (Personne n’attend la nuit) qui avait fait l’ouverture du festival en 2015, avec justement comme actrice principal Juliette Binoche, actuelle présidente du jury. Elle revient cette année, mis à part avec cette histoire Netflix, avec un film qui sur le papier avait des éléments pour en espérer le mieux: une histoire vraie mais quasiment incroyable et le choix du noir et blanc pour la raconter. Hélas, trois fois hélas, la réalisatrice espagnole fait pour le nouveau cinéma en ligne du vieux cinéma appliqué, concentré sur sa forme, froid, sans aspérité ni profondeur, glissant à la surface des choses et des personnages. Et pourtant, il y avait de quoi faire, l’histoire étant celle du premier mariage de même sexe (jamais été annulé) qui a eu lieu en 1901 en Espagne. Certes, cet événement est dû à une ruse des deux femmes, l’une se faisant passer pour un homme. Mais tout de même, quelle matière première à la fois pour dévoiler un moment historique et le relier à une actualité où les résistances n’existent pas seulement dans les pays dits non-occidentaux. Pour être précis, Isabel Coixet fait le lien avec aujourd’hui… simplement par l’insert classique d’avant générique de fin de quelques données statistiques sur les législations dans le monde sur le mariage de même sexe et l’homosexualité.

— Natalia de Molina, Greta Fernández – Elisa y Marcela (Elisa & Marcela)
© Netflix

Le scénario est basé sur le libre Elisa y Marcela: más allá de los hombres (Elisa and Marcela: Beyond Men) de Narciso de Gabriel qui raconte comment, lors de son premier jour d’école à La Corogne en 1885, Marcela rencontre Elisa, avec qui elle noue une forte amitié. Très vite le père de Marcela désapprouve cette amitié et l’envoient étudier ailleurs pour dissiper les soupçons qui pèse sur les deux jeunes filles. Les années passent, mais leurs restent les mêmes et s’entretiennent par correspondance. De retour en Galice, Marcela décide de partir à la recherche d’Elisa pour qu’elles puissent vivre une vie commune de bonheur. Là aussi, les rumeurs commencent à circuler, les quolibets à fuser et la violence contre les deux femmes à s’installer. Pour pouvoir vivre leur histoire d’amour, le couple échafaude un plan : Elisa quittera la ville pour un moment et reviendra après s’être “transformée” en Mario, son cousin décédé qui vivait en Angleterre. Par un stratagème religieux, elle parviendra convaincre le prêtre de la grande ville à la marier à Marcela.

À chaque film, Coixet devient plus virtuose dans sa technique, à chaque film son cinéma perd un peu de son âme.

D’ Isabel Coixet; avec Natalia de Molina,Greta Fernández , Jorge Suquet, Lluís Homar, Manolo Solo; Espagne; 2018; 113 minutes.

Malik Berkati, Berlin

© j:mag Tous droits réservés

Malik Berkati

Journaliste / Journalist - Rédacteur en chef j:mag / Editor-in-Chief j:mag

Malik Berkati has 892 posts and counting. See all posts by Malik Berkati

One thought on “Berlinale 2019 – Compétition jour #7: Elisa y Marcela (Elisa & Marcela) d’Isabel Coixet – Quand l’esthétique étouffe l’artistique

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*