Des nouvelles de la planète Mars
Dominik Moll, un réalisateur qui veut du bien à ses personnages
Philippe Mars est ingénieur informaticien, divorcé, père de deux adolescents et confronté à son environnement qui ne semble être pour lui que source de problèmes. La nuit, Philippe Mars (François Damiens) rêve d’apesanteur, il est seul dans l’espace, flotte, il se sent bien… puis le réveil sonne et les extravagances de la vie – pleinement incarnées par Jérôme (Vincent Macaigne), un collègue totalement givré – le font retomber dans la gravité du monde.
Des nouvelles de la planète Mars porte certes les ingrédients classiques de la comédie dramatique mais Dominik Moll, qui aime jouer avec les genres cinématographiques (Harry, un ami qui vous veut du bien –2000, Lemming–2005, Le Moine –2011), instille les éléments qui rendent le récit plus lunaire à défaut d’être pleinement martien et abouti. Car malgré le très bon travail d’écriture, de jolies pépites dans les dialogues et quelques scènes de situation déjantée très réussies, le déroulé de l’histoire souffre d’une trop grande prévisibilité et d’un manque de mordant pour entrer pleinement dans la satire. Heureusement, comme pour ses films précédents, le réalisateur s’efface derrière ses comédiens et dans l’espace qui leur est laissé, ils deviennent les meilleurs ambassadeurs de sa planète Mars qui incarne la question : quelle est la folie la plus dangereuse pour la société, celle borderline de Jérôme ou celle de la passivité de Philippe Mars ?
de Dominik Moll; avec François Damiens, Vincent Macaigne, Veerle Baetens, Jeanne Guittet, Tom Rivoire, Léa Drucker, Michel Aumont, Catherine Samie; France, Belgique; 2016; 101 min.
Sortie en Suisse romande le 09.03.2016
Extraits de l’entretien que vous pourrez retrouver dans Le Courrier de ce week-end
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Vos personnages semblent totalement coller à François Damiens et Vincent Macaigne.
Quand on a écrit les personnages avec Gilles Marchand, c’était important pour nous que l’on puisse s’attacher à eux, que l’on soit content de passer du temps avec eux. On a pris du plaisir à les créer, les inventer. Pour le rôle de Philippe Mars et de Jérôme, il fallait trouver des comédiens qui aient un côté très humain et attachant. François et Vincent possèdent ces qualités mais en plus, ils ont chacun leur folie, ce qui est bien sûr très important pour le personnage de Jérôme car il est vraiment fou, mais Philippe Mars aussi, il a juste mis un couvercle sur sa folie.
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Philippe Mars est-il le reflet de cette société en permanence inquiète?
L’inquiétude et même la peur de la vie est quelque chose qui prend des proportions assez fortes. Après la Chute du mur de Berlin on disait, ça y est la démocratie, le capitalisme ont gagné, tout va bien, il n’y a plus d’Histoire. On a bien été rattrapés depuis : le terrorisme, la crise économique, le chômage, le nationalisme, etc. Mais comme Roosevelt disait: la seule chose dont il faut avoir peur c’est la peur. La peur peut être quelque chose de paralysant et, même s’il ne s’agit pas d’être naïf ou fleur bleue et dire – oui tout va bien, il est important de garder une forme d’optimisme. C’est pourquoi les parents fantômes de Philippe Mars ont l’air bien dans leur vie même s’ils sont morts. Tout en étant lucides sur les choses, en disant – mais tu sais à notre époque ce n’était pas mieux, il y avait de l’inquiétude aussi, ils gardent ce côté positif. Si on se laisse gagner par la peur on est foutu.
Malik Berkati, Berlin
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Sortie en salles en Suisse romande ce 09.03.