FFMUC2022 – Quantum Cowboys, un western disruptif protéiforme. Rencontre avec son réalisateur, Geoff Marslett
Première partie d’une trilogie intitulée The Arizona Antilogy (L’antilogie de l’Arizona), Quantum Cowboys est un objet cinématographique original qui concentre dans ses 99 minutes toutes les techniques possibles de rendu visuel, allant de l’animation par rotoscopie aux prises de vue en 16mm, en passant par le stop motion ou les collages, 12 différentes techniques au total. Les sauts quantiques dans l’espace et le temps du scénario apposent à cette œuvre un narratif disruptif qui entraîne le public dans le sillage d’intention du réalisateur texan (Mars, 2010 ; Loves Her Gun, 2013) qui s’intéresse à la manière dont l’exploration de notre univers nous change, nous et le lieu que nous explorons. À l’apparence expérimentale, ce western n’implique pas que nous soyons particulièrement instruit.es en physique, en philosophie ou en art cinématographique, Geoff Marslett alliant dans sa forme et son contenu les deux piliers du quantum, de manière à ce que sa réception soit plus instinctive, sensorielle que cérébrale… Il faut tout de même accepter d’entrer dans ce concept et de s’y laisser porter, cette prémisse étant en contradiction avec sa conséquence, mais nous ne sommes pas à un saut quantique près !
La ligne narrative est quant à elle claire : Frank (Kiowa Gordon), repris de justice, et son ami Bruno (John Way) errent dans le désert de l’Arizona des années 1870, ils ont cependant vaguement un but, celui de retrouver un musicien, Blacky. Lors de leur périple, ils rencontrent Linde (Lily Gladstone – Certaines Femmes, 2016; First Cow, 2019; Killers of the Flower Moon, 2022), une femme volontaire, issue des Premières Nations qui s’est donné pour mission de récupérer sa terre. Hélas, pour elle, l’obstacle est double dans le Nouveau monde (comme partout, d’ailleurs) : elle est autochtone et femme ! Frank et Bruno décident de l’aider, mais la chevauchée des trois compères va se heurter à plusieurs obstacles, dont celui peu commun des retours de bâtons de l’espace-temps.
Marslett tend ici un arc entre la partie philosophique et celle de mécanique physique du quantum : les épisodes d’embardées physiques ou mentales de Frank entre les lignes temporelles et cosmiques font écho au récit lui-même, qui rappelle une phrase du philosophe Paul Valéry : « L’absurde et son contraire participent des mêmes forces. La nature verse un quantum qu’il lui est indifférent que nous dépensions en sottises ou en miracles d’intelligence. » L’absurde s’incarne dans l’équipe de tournage qui s’immisce dans le récit, dans les commentaires sur le script qui ferait sens – ou pas, à travers le narrateur qui se nomme Memory – et son chat, qui n’est pas sans rappeler celui de Schrödinger ! Ce sont des moments de respiration, d’humour mais aussi d’éclairage, ou du moins de points de repères de compréhension, comme cette séquence dans laquelle Frank se retrouve face à l’équipe du film et l’un d’entre eux lui dit : « La mémoire change tout le temps sauf si on l’enregistre, alors elle devient un point fixe. C’est pour cela que tu as traversé l’arche : pour fixer ta propre mémoire, non ? »
Quantum Cowboys n’est pas à prendre à la lettre, il n’est pas interdit de laisser son esprit flâner un peu dans l’histoire de ce trio, dédiée à Anna Karina qui aurait dû interpréter le rôle de Memory – elle est malheureusement décédée avant que les scènes de ce personnage soient tournées, de glaner parmi la foison d’éléments philosophiques, historiques, politiques, sociétaux, scientifiques, métaphysiques, artistiques que Marslett fait jaillir ceux qui font écho à notre propre perception du monde.
Le film, avant sa projection au Festival de Munich, a été présenté au Festival international d’animation d’Annecy où il a reçu le Prix de la meilleure musique originale (Howe Gelb et Maciej Zielinski), et au Champs-Élysées Film Festival où il a remporté le Prix du public.
De Geoff Marslett ; avec Lily Gladstone, Kiowa Gordon, Patrick Page, John Way, Trieste Kelly Dunn, Alex Cox, John Doe, Franck Mosley, Walter Anaruk, Howe Gelb, David Arquette et une apparition d’Anna Karina ; 2022 ; États-Unis ; 99 minutes.
Rencontre avec Geoff Marslett
Votre réalisation est complexe, avec toutes les techniques possibles, allant de séquences tournées de manière classique au stop motion, en passant par des incrustations de dessins dans de vrais décors. Pourquoi et comment avez-vous choisi quelles séquences seront comme ceci ou cela dans le processus d’écriture ?
Dans le processus d’écriture, chacun de ces différents visuels représente l’histoire du point de vue de chaque personnage principal. Frank, lui, a plusieurs personnalités, donc de multiples points de vue, c’est pourquoi, le concernant, un certain visuel représente un de ses points de vue, et un autre montre un autre de ses regards sur le monde. À l’écriture du scénario, je savais ce qui allait changer visuellement selon le point de vue du personnage que je voulais montrer à cet endroit de l’histoire. Cependant, je n’avais pas encore décidé quelle animation j’allais utiliser pour celui-ci ou celle-là. La décision du choix de la technique associée à telle personne s’est faite à la production. Ce n’était pas facile durant le tournage avec les acteurs.trices, car il fallait qu’ils et elles soient consistant.es dans le jeu, mais que le rendu puisse fonctionner dans les différents styles de techniques. Choisir ces techniques pour chaque personnage et leur univers n’a pas été aisé. Mais je n’ai pas voulu que cela apparaisse abstrait, il fallait que le public sache et reconnaisse à tous moments les personnages, quelle que soit la technique utilisée ; je ne voulais pas transformer mes acteurs et actrices en cartoon. Pour résumer (rires) : dans le processus d’écriture, j’ai décidé quand les changements devaient être faits, et pendant le tournage, nous avons décidé spécifiquement quels devaient être ces changements.
Tout a été tourné de manière conventionnelle…
Oui, tout a été tourné normalement. Parfois, nous avons tourné devant un écran vert, parfois en décor naturel, dans le désert. Dans les scènes avec les chevaux, nous étions dans le Colorado. Il avait neigé. J’ai dû effacer la neige, car nous nous étions supposés être en Arizona ! Autour de chaque trace de pas des chevaux dans la neige, j’ai dû l’enlever, par exemple, ce qui est un travail fastidieux (rires). Même quand Memory apparaît en stop motion, nous l’avons filmé au préalable.
Cela a dû être un processus très long de faire ce film !
La partie la plus rapide a été celle du tournage. L’animation est toujours beaucoup plus longue. On a tourné environ un mois entre octobre et novembre 2019 pour avoir 75 % du film. Puis le Covid est apparu, tout a été ralenti. Nous devions aller à Paris en novembre pour filmer toutes les scènes avec Anna Karina. Mais elle est tombée malade, nous avons repoussé à mars, malheureusement elle n’était pas simplement malade, elle a eu un cancer et est décédée. Elle devait jouer Memory. J’ai donc dû réécrire le rôle pour Patrick Page qui a fait un formidable travail. Nous avons tourné cette partie à New York pendant quelques jours en 2020, 7 ou 8 mois après le tournage principal. Puis, nous sommes allés tourner dans le désert les scènes en 16 mm pendant environ une semaine. Disons environ six semaines de tournages mais étalé sur trois périodes. Ensuite, il a fallu deux ans et demi pour l’animation !
Il y a une composante politico-historique dans votre histoire : celle de la propriété de la terre, ici une personne d’ascendance des Premières Nations, qui plus est une femme, ce qui fait une double thématique…
C’est là où j’ai grandi, dans le sud-ouest des États-Unis. Ces problèmes de droit à la terre, de déplacements de population, mais aussi des animaux comme les ours, les loups, etc. sont très importants pour moi. Notre terre est un endroit si petit et magique, nous devons le partager d’une manière ou d’une autre. Or l’histoire humaine nous prouve que ce besoin d’appropriation et de colonisation du monde qui nous entoure va bien au-delà : les gens revendiquent des terres, des ressources, la connaissance, etc. ; pour moi, cela semble être une manière très malsaine d’interagir. Mon premier film, Mars (2010), évoque ce que cela signifie d’aller vers une autre planète. Notre réflexion sur l’Ouest est presque toujours représentée de manière iconique. J’aime beaucoup Sergio Leone, j’ai du plaisir à regarder Clint Eastwood, mais ces films reviennent toujours sur des hommes qui se concurrencent avec des armes pour posséder quelque chose. Le western est un genre que j’aime regarder mais qui ne correspond pas à ma réalité de cette partie des États-Unis – et à la réalité de beaucoup de gens, d’ailleurs. Il était important pour moi de m’ancrer dans cet environnement et de montrer une version différente de l’Ouest, exprimer l’idée que l’on peut regarder ce monde autrement. Pour moi, Linde représente celles et ceux qui étaient là avant, le personnage de Bruno est un migrant européen dans le nouveau monde, et Frank – qui est aussi joué par un acteur autochtone, mais dont l’origine n’est pas thématisée, donc le public ne s’en rend pas compte – représente le futur possible. Parfois, nous sommes déconnecté.es de notre passé, ce personnage permet de mettre en scène quelqu’un qui a une énorme connexion avec la terre mais qui n’en est pas conscient. Il est important de montrer comment les temps changent, quels sont les relations des gens avec eux-mêmes, leur perception d’eux-mêmes. Je voulais que les spectatrices et spectateurs ressentent eux aussi qui elles et ils sont en rapport avec la terre. L’Arizona de 1873 ressemble beaucoup à l’Arizona de 1973, tout comme l’Arizona de 2073 probablement. Il y a certainement moins de différences entre l’Arizona de 1873 et 2073 qu’entre Munich en Allemagne et le sud de l’Arizona en 2022. Je voulais vraiment construire cette impression, à cet égard, Lily était l’actrice parfaite pour ce rôle. Elle est en contact étroit avec sa propre histoire, son expérience dans ce monde m’a permis de collaborer avec elle sur ces notions et d’ouvrir encore plus le rôle.
Vous avez écrit l’histoire en pensant à elle ?
Oui. Je voulais absolument lui proposer ce rôle. J’avais vu son premier film, Winter in the Blood (2013) où elle n’avait pas le rôle principal, mais dont la performance m’a époustouflé. Quand j’ai commencé à écrire, je l’avais en tête, mais sa carrière commençait à s’intensifier ; j’avais peur que cela ne joue pas avec son agenda. Mais elle a été tellement généreuse avec son temps, prenant l’avion d’une autre production pour venir sur la mienne, par exemple. Lorsqu’elle choisit de jouer dans des histoires comportant une consonance autochtone, il faut que le rôle intègre une expérience humaine complexe, il est exclu qu’elle joue « la native de service » ou dans des histoires basiques et stéréotypées. Ce n’est pas parce qu’on est ou qu’on joue un.e autochtone qu’on n’est pas un être humain à part entière ! Souvent ces personnages (ou ces histoires) doivent cocher les cases d’une liste de clichés alors qu’ils font partie d’un tout complexe comme chacun.e d’entre nous. Comme évoqué avant, Kiowa Gordon qui joue Frank, mais aussi celui qui joue le chef de production, sont des autochtones non définis comme tels, car ce sont des acteurs et cette histoire n’est pas obligatoirement leur histoire.
Quel est votre rapport avec Anna Karina?
Mon co-scénariste était ami avec elle depuis une dizaine d’années. Nous avons écrit ce rôle spécifiquement pour Anna, je voulais un personnage qui symbolise la mémoire, qui porte avec acuité cette culture des mémoires – qui mieux qu’Anna Karina pour l’incarner ? C’était une icône, avec des décennies de cinéma derrière elle, elle était parfaite pour incarner Memory, celle qui la fait passer de générations en générations. Quand nous lui avons proposé le projet, elle a accepté. Son décès a été la chose la plus dure dans cette production. Pendant deux ans, j’ai travaillé tous les jours jusqu’au milieu de la nuit sur l’animation, cela a été brutal. Mais lorsqu’elle est décédée, c’était incomparable. Je ne voulais pas la couper totalement du film, cela n’aurait pas été juste. Elle était ce personnage que nous avions imaginé et une partie du processus de création vient de ce personnage. Le fait qu’Anna Karina devait être ce personnage faisait partie du processus de création du film. Quand elle n’était plus là, nous avons dû décider que faire. Créativement, ce fut la partie la plus difficile de ce film. Finalement, nous avons pu utiliser des morceaux de répétitions que nous avions enregistré avec elle, non pas avec une bonne caméra, comme celle avec laquelle nous avons travaillé après, mais au moins elle dans le film – nous sommes très heureux d’avoir pu l’honorer avec ce petit passage et lui donner une dernière apparition à l’écran. Il y a quelques jours, nous avons présenté le film à Paris, c’était très émouvant : il y avait son manager, son cercle d’ami.es, il y avait des larmes et du vin, mais tout le monde était heureux de cet hommage, de la voir une dernière fois sourire sur un écran.
Vous traitez la notion de la mémoire, comment la conserver, la restituer : est-ce que dans Quantum Cowboys, la porte de la mémoire, c’est la représentation visuelle ?
Le personnage de Memory lui-même ?
Oui.
C’est clairement un film complexe, les gens ont besoin parfois de le regarder deux ou trois pour remarquer des choses qui ne sont pas nécessairement visibles au premier regard. Pourquoi le narrateur change plusieurs fois visuellement ? C’est une question importante et complexe. Ce film est le premier d’une trilogie. Dans cette première partie, Memory semble briser le quatrième mur (un mur imaginaire qui sépare l’histoire du monde réel, N.D.A.), parle avec le public, mais en réalité, Memory est également un personnage de ce monde, en fait ses adresses vont à son chat. La raison pour laquelle Memory change, c’est parce que le personnage de Patrick Page est sujet aux mêmes règles que le reste des protagonistes – quand il apparaît en stop motion, cela exprime une version solidifiée de Memory. Il est représenté dans un multiple collage, car il existe dans un monde multiple Si nous pouvons réaliser la trilogie, vous pourrez voir ce personnage interagir avec les autres et ne pas être un simple narrateur.
Comment les comédiens ont-ils appréhendé l’histoire disruptive et le mixage des techniques ?
Vous savez, j’enseigne à l’université et je dis toujours à mes étudiants : « soyez conscient que le film que vous croyiez pouvoir faire n’est jamais le film que vous faites ! Garder en tête de faire le meilleur film que vous pouvez, avec les moyens que vous avez ». L’un des compromis que vous devez souvent faire est lié aux performances des comédien.nes et à leur compréhension de leurs rôles. Pour ce film, j’ai eu le plus grand cadeau que je puisse avoir avec mes acteurs. Je les ai bien choisis, j’ai travaillé intensément au choix de l’équipe. Normalement, j’aurais dû faire des compromis et espérer avoir un résultat supérieur au compromis. 100 % de ce film, chaque performance des actrices et acteurs est l’opposé du compromis. Elles et ils ont ouvert toutes les portes : lorsque je voulais recueillir quelque chose d’une scène, je l’avais avec des éléments supplémentaires offerts par leur performance. Aucun.e d’entre elles et eux n’a eu de difficultés dans le sens où j’avais leur confiance, elles et ils lâchaient prise. C’était un processus qui pouvait leur faire peur, car dans les films traditionnels, vous avez des costumes, des accessoires : vous faites le Pirate des Caraïbes, vous sautez du bateau et vous savez que le rendu sera bon, parce que le décor est magnifique et qu’il y a les moyens. Nous, on était dans une grange ou un écran vert, avec le minimum de costumes, et un.e acteur.trice peut se poser la question : « tu es sûr que cela va rendre bien ? ». Mais au-delà de la confiance dont ils et elles me gratifiaient, autre chose les a aidé.es : leurs co-prestations, qui étaient si bonnes que vous pouviez presque les lire sur leurs visages : quand vous êtes un.e acteur.trice et que l’on vous livre une excellente performance, vous voulez, vous aussi, monter d’un cran. C’est ce qu’ils et elles ont littéralement fait : sauter dans ce monde que nous leur avons proposé. Même si parfois l’un.e ou l’autre ne comprenait pas complètement comment il ou elle s’intégrait dans une scène, nous communiquions, j’essayais de répondre aux interrogations spécifiques, de leur dire de ne pas se préoccuper du reste du scénario, simplement de se situer dans l’histoire sans s’attacher à la chronologie d’ensemble, se concentrer sur ces deux minutes de la séquence. Ici, je dois accorder beaucoup de mérites aux commedien.nes.
En quelque sorte, ils et elles ont effectué une performance quantique…
(Rires) Oui, exactement ! Il y a une chose que j’aimerais dire à celles et ceux qui liront cela et veulent être comédien.nes ou cinéastes : une des plus grandes leçons que j’ai apprise, et qui fait de moi un meilleur réalisateur, a été de trouver comment communiquer de différentes manières avec différent.es acteurs.trices, parce que chacun.e d’entre elles et eux est un être humain différent qui répond à différents modes de communication. Le travail d’un.e cinéaste est de développer diverses compétences de communication pour faire ressortir et déterminer le niveau micro de chaque scène, parce qu’en fin de compte, c’est toi qui vas finir par les assembler ! On peut tirer un parallèle entre le travail de réalisation et ce que fait Memory dans ce film : vous découpez ces souvenirs pour les réassembler, mais vous devez faire en sorte que chacun d’entre eux résonne par lui-même ; parfois ils ne conviendront pas à votre film, même si ce sont de bonnes scènes, mais vous pouvez faire en sorte que chaque petit morceau passe la rampe, vous aurez au moins les bases de l’architecture pour en faire quelque chose qui a une résonance émotionnelle pour le public.
Il y a une mise en abîme du film : vous vous mettez en scène, filmant les événements, il y a des commentaires sur le scénario – qui ferait sens ou pas. Est-ce une manière ludique de montrer que vous ne vous prenez pas trop au sérieux ?
C’est exactement cela ! Je pense que l’on utilise l’art pour exprimer notre expérience du monde. J’ai étudié les sciences, la philosophie et les mathématiques avant de faire du cinéma, je réfléchis profondément aux choses, mais je crois aussi fermement qu’il est très risqué de se prendre trop au sérieux, de penser que l’on peut tout comprendre. Quand on appréhende la réalité de ces univers, on ne voit qu’une partie de l’iceberg. Chaque fois que l’on voit quelque chose de nouveau, que l’on saisit une idée, on arrache la carcasse d’une autre idée, on est toujours en train de l’écorcher. Ma propre expérience de vie, que j’essaie de porter à l’écran, est que tu ne dois pas être convaincu d’avoir raison, car probablement, ce n’est pas le cas. Si tu veux aborder les grandes idées, si tu le fais de manière ludique, si tu as tort, si quelqu’un n’est pas d’accord, c’est ok. C’est une manière simple de communiquer, de grandir. Les enfants grandissent, c’est leur seul boulot et ils le font de façon récréative, ils sont heureux de grandir comme cela. Quand on devient adulte, on fige nos croyances, nos convictions, et si on restait dans un endroit quelque peu ludique, il y aurait beaucoup plus d’espace pour continuer à grandir toute votre vie. J’aime aussi les films sombres et sérieux, mais ce n’est pas ce que je fais. Il est bien de regarder mes films et leurs grandes idées, mais ils sont aussi un peu loufoques. Parfois les gens viennent voir les films et ont peur de rire. Je leur dis : « Allez, rigolez !, c’est censé être drôle, peut-être qu’on peut rire ensemble et, grâce à cela, faire partie de la même équipe un peu bancale ! » Pour le spectateur, regarder ce film doit être une expérience, il n’y a pas besoin que tout le monde comprenne tout dans le film. Moi aussi j’apprends en permanence en regardant des films en salles, nos cerveaux connectent certaines idées, les coïncidences connectent les idées aussi, c’est pourquoi il faut rester dans la modestie du ludique, je ne me vois pas placer mes idées sur un piédestal. Je ne prêche à personne.
Malik Berkati, Munich
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