Un festival de Locarno 2020 hybride, aménagé à l’aune du nouveau coronavirus
Le festival de Locarno qui fête ses septante-trois ans se voit amputer de son événement-phare : les projections du film du soir sur la fameuse Piazza Grande de la ville qui accueille traditionnellement près de 8000 spectateurs. Mais l’édition 2020 aura tout de même lieu du 5 au 15 août ; principalement en ligne mais physiquement également dans un format réduit.
Nous sommes orphelins de la Piazza Grande, la place du Risorgimento de Locarno qui est l’âme et le symbole du Festival. Rien ne peut la remplacer, parce qu’un festival est par définition un lieu de rencontres. Toutefois, le Tessin sait aller de l’avant, peut-être grâce à cette pointe de tempérament italien qui nous fait prendre la vie avec le sourire, et ne jamais se laisser abattre par une crise capable de mettre certitudes et orgueil à genoux. Nous affrontons cette situation difficile avec deux objectifs. Premièrement : maintenir dans le monde, grâce à un Festival physique et virtuel, la position, la notoriété et la crédibilité acquises en plus de sept décennies de rigueur et de cohérence artistiques. Deuxièmement : ne pas décevoir les attentes du public, force motrice du Locarno Film Festival, en continuant à partager avec lui – plus encore en une année où le dialogue a été « suspendu » – ces récits, regards et visions qui nous animent depuis 73 ans : les films.
explique avec enthousiasme Marco Solari, président du Locarno Film Festival.
Titre de l’édition 2020 : For the Future of Films
L’édition physique se tiendra dans trois cinémas de la ville avec des projections de la seule compétition officielle maintenue – les Pardi di domani, la section qui encourage la relève des cinéastes nationaux et internationaux avec des courts métrages réalisés par des cinéastes qui n’ont pas encore fait de longs –, ainsi que d’une sélection de courts et longs métrages, dont la section Open Doors, programme qui fête ses 18 ans et se consacre aux cinématographies des pays dits « émergents ». Certaines projections sont, à date, prévues en présence des équipes des films. De plus, la directrice artistique du festival, Lili Hinstin, a sélectionné huit films surprises qui seront projetés au Grand Rex à 21 heures.
L’édition en ligne sera gratuite, les films, débats et tables rondes seront accessible de partout.
Hinstin expose sa réflexion sur les effets de la pandémie sur le festival :
Fait extraordinaire : le monde entier est en train de vivre une expérience collective. Au-delà de la tragédie et de la souffrance qui a touché les uns et les autres, c’est la révélation d’un monde global dont nous sommes en train de faire l’expérience. Un monde dont nous sommes devenus le centre et que nous expérimentons de chez nous à travers les écrans de nos ordinateurs et de nos téléphones. Le cinéma étant la médiation du monde à travers des images et des sons, nous qui travaillons sur les films étions peut-être particulièrement préparé à expérimenter ce moment, mais c’est aussi pour chacun d’entre nous l’expérience nouvelle d’un retour sur soi, d’un temps différent, un temps où la réflexion a plus sa place que d’habitude, où la vitesse sociale à laquelle nous sommes soumis s’est allégée, s’est ralentie.
C’est un moment de questionnements profonds et l’occasion pour nous de repenser le Festival, de se demander quelle est sa mission profonde, son essence. Première réponse : défendre, soutenir et accompagner les artistes et leurs œuvres. A travers les choix que nous faisons, proposer au public et à la presse une cartographie éphémère d’un état du monde et des hypothèses esthétiques pour le représenter. Tout l’édifice complexe du Festival, les partenaires et les sponsors, concourent à cette carte et aux chemins qu’elle suggère.
Aussi, en cette période de grave crise sanitaire, nous avons décidé de travailler selon deux axes avec le comité de sélection : responsabilité et solidarité. Responsabilité d’une part en décidant de renoncer à nos grandes salles, en particulier l’iconique Piazza Grande, qui font la gloire et le plaisir de Locarno (un des seuls festivals de cette importance où l’on est presque assuré d’avoir une place pour voir un film) et partant, aux différentes sections compétitives consacrées aux longs métrages. Proposer du cinéma d’auteur sur un petit écran en plein mois d’aout post-confinement ne semblait pas la condition idéale pour un film de rencontrer son public. A la place, nous avons décidé de mobiliser une partie de l’argent destiné aux traditionnels Prix et nous avons créé le projet The Films After Tomorrow, auquel se sont ajoutés différents partenaires, qui offrira une contribution financière de 30’000 à 70’000 CHF à des films dont la fabrication a été mise en péril par le Covid-19.
En résumé, Locarno 2020 c’est: 11 jours de festival, 6 sections et 121 films; 3 cinéma et le Web; 83 projections en ligne et 103 en salle; 49 longs métrages et 72 courts métrages; des masterclass, des conversations, des films d’archives, des initiations de projets… Bref, une édition certes limitée mais très dynamique!
Attention, à cause des normes sanitaires édictées par l’OFSP, il est nécessaire de s’inscrire avant les projections sur le site du festival, même si on est en possession d’un abonnement saisonnier du festival.
Pour les visionnages en ligne, il faut également passer par le site du festival pour suivre la marche à suivre. Concernant les projections en ligne gratuite, chaque spectateur sera convié à librement contribuer, l’argent récolter ira aux salles de cinéma indépendantes suisses.
Le western vériste de Kelly Reichardt, First Cow, qui était en compétition à la Berlinale 2020, fera l’ouverture de cette 73e édition.
https://www.locarnofestival.ch
Malik Berkati
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