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Le Théâtre de Carouge invite le Théâtre des Osses qui propose une magnifique adaptation du Journal d’Anne Frank

Qui ne connaît pas Le Journal d’Anne Frank ? Ce cahier à couverture à carreaux rempli d’une écriture régulière est devenu emblématique, universel témoignage de la résistance des Juifs, mais aussi de tous les autres groupes persécutés – homosexuels, communistes, résistants, isogames – par la machine à exterminer nazie. Et pourtant, le Journal d’Anne Frank nous émeut et nous bouleverse toujours.

Cette nouvelle adaptation dans une mise en scène ingénieuse et novatrice  est signée Geneviève Pasquier et Nicolas Rossier, que nous avons pu rencontré juste avant le lever du rideau alors que le foyer résonne des voix du public, déjà abondant, qui attend impatiemment l’ouverture des portes de la petite Salle du Théâtre de Carouge, sis Rue Ancienne 57.

Le tandem du Théâtre des Osses – Geneviève Pasquier et Nicolas Rossier – se sont penchés sur cette oeuvre maintes fois adaptée et portée sur les planches, mais aussi adaptée au cinéma et en bandes dessinées. Le duo s’est questionné:

Que peut-on bien écrire jour après jour quand on a treize ans et que l’on vit enfermée avec sa famille pour échapper à la persécution nazie ? Le Journal d’Anne Frank est un récit intime qui révèle non seulement un pan tragique de l’Histoire mais aussi l’esprit d’analyse d’une jeune fille qui croit au changement et parie sur la vie. Cette adolescente turbulente, inventive, secrète, révoltée, trouve dans l’écriture le souffle nécessaire pour survivre. Mais elle est aussi, sous bien des aspects, une adolescente « comme les autres »: elle grandit de 13 centimètres en deux ans, comme en témoignent les petites marques au crayon sur le mur de sa cachette, et voit son corps se transformer. Une adolescente qui n’aurait demandé qu’à vivre et faire exploser son talent d’écrivain si la barbarie humaine n’avait stoppé cet élan.

À l’heure où les derniers témoins de la Shoah disparaissent et après un succès public lors des représentations au Théâtre des Osses, Le journal d’Anne Frank continue sa tournée pour des représentations au Théâtre de Carouge juasqu’au 17 avril 2019.

Comme le rappellent Geneviève Pasquier et Nicolas Rossier :

Entre 1942 et 1944, Anne Frank, sa soeur Margot et ses parents, accompagnés de la famille van Pels, se cachent durant deux ans pour échapper aux persécutions nazies. Ces événements sont consignés dans le journal intime de la jeune fille depuis ses 13 ans et jusqu’à son arrestation à l’âge de 15 ans. Dans ce contexte de persécution et de claustration, l’adolescente décortique avec une grande lucidité les relations familiales et assiste à sa propre transformation. L’écriture lui donne le souffle nécessaire pour survivre et pour mettre en place sa propre pensée.
Le Journal nous interroge plus fortement que jamais sur la discrimination et la haine raciale, sur nos choix devant des situations semblables, sur le risque de se trouver au sein de la majorité silencieuse. À l’heure où les derniers survivants de la Shoah disparaissent et où les repères s’éparpillent, l’adaptation au théâtre du Journal d’Anne Frank peut constituer une tribune importante pour poursuivre le débat.

Quel terrible destin que celui de la famille Frank ! Anne Frank naît à Frankfort en 1929. Sa soeur Margot a trois ans de plus qu’elle. Ses parents, Otto et Edith, décident de quitter l’Allemagne suite à la montée de l’antisémitisme menée par Hitler. Ils déménagent à Amsterdam. C’est là que son père Otto fonde une entreprise d’agents gélifiants pour la fabrication de confiture. Anne suit sa scolarité dans une école néerlandaise, elle apprend vite la langue et se fait de nouveaux amis. Au mois de septembre 1939, l’Allemagne nazie envahit la Pologne et la Deuxième Guerre mondiale commence. Huit mois plus tard, en mai 1940, les allemands envahissent les Pays-Bas. Petit à petit, les droits des juifs s’amenuisent ; Otto perd son entreprise (les juifs ne sont plus autorisés à gérer leurs commerces), et Anne doit intégrer une école juive. Progressivement, les trams et les trains sont interdits aux Juifs qui ne sont autorisés à prendre que le bac ou à … aller à pied. Dès le printemps 1942, le père d’Anne commence à aménager une cachette dans l’annexe de son lieu de travail au 263 Prinsengracht. Il est aidé par ses collègues et quatre autres personnes. Le 5 juillet 1942, sa soeur Margot est appelée à rejoindre un « camp de travail », et c’est là que ses parents décident de se cacher pour échapper à la persécution. Pour son treizième anniversaire, juste avant que toute sa famille intègre l’annexe, Anne reçoit un journal intime dans lequel elle racontera la vie dans l’annexe secrète pendant deux ans. Lorsque le Ministère de l’éducation du gouvernement des Pays-Bas en Angleterre fait un appel sur les ondes de Radio Orange de garder les journaux intimes et tous documents relatifs à la guerre, Anne Frank décide de réécrire son journal personnel en une seule histoire qu’elle intitule L’Annexe secrète. Alors que le Débarquement en Normandie par les troupes américaines a eu lieu deux mois auparavant, le 4 août 1944, les habitants de l’annexe sont arrêtés et transférés au camp d’Auschwitz-Birkenau.
Le voyage dura trois jours. Anne, sa soeur et sa mère sont envoyées dans un camps de travail pour femmes et son père dans un camps de travail pour hommes. En novembre 1944, Anne et sa soeur son déportées au camps de concentration de Bergen-Belsen tandis que leurs parents restent à Auschwitz. Les deux soeurs, atteintes par le typhus, meurent en février 1945. Otto est le seul survivant de l’annexe secrète ; il est libéré par les Russes. (Source : Fondation Anne Frank, NDLR).

Geneviève Pasquier et Nicolas Rossier sont partis à Amsterdam pour visiter la Maison d’Anne Frank. Prenant conscience de l’espace exigu de l’annexe, le duo a recouru a une mise en scène ingénieuse, faite de trois rampes d’escaliers que les jeunes comédiens n’ont de cesse de monter et descendre et qui traduisent la superficie confinée dans lequel les huit membres de l’Anexe se sont réfugiés. Les metteurs en scène se sont ensuite rendus à la Fondation Anne Frank, une fondation domiciliée à Bâle créée par Otto Frank le 24 janvier 1963.

En tant qu’unique survivant de la famille Frank et par conséquent l’héritier d’Anne Frank, Otto Frank a désigné la Fondation Anne Frank comme son héritière universelle. C’est la raison pour laquelle la Fondation possède les droits de tous les écrits d’Anne Frank mais nous n’avons eu aucune entrave pour travaillé sur notre adaptation

précise Nicolas Rossier avant de poursuivre :

Le but de la Fondation est de promouvoir des projets dans l’esprit du message d’Anne Frank. La volonté d’Otto Frank, notamment, était de contribuer à une meilleure compréhension entre les sociétés et les religions, d’encourager la paix entre les peuples et les nationalités et de promouvoir le contact international entre les jeunes.

— Nicolas Rossier
© Firouz Pillet

Magnifiquement interprété par un trio de jeunes comédiens à peine plus âgés que leur personnages – Judith Goudal (Anne Frank), Laurie Comtesse (Margot), Yann Philipona (Peter) – qui montent et descendent avec une énergie et une fougue qui transmettent leur jeunesse et leur état d’esprit, tous volontaires et étudiant pour préparer leur sortie de ce refuge qu’ils espèrent temporaire et leur avenir. La mise en scène de Geneviève Pasquier et de Nicolas Rossier a su judicieusement placé un rétroprojecteur qu’à tour de rôle, l’un des trois comédiens utilisent pour crier et projeter soit des extraits du Journal d’Anne Frank, soit des portraits des huit réfugiés de l’Annexe, soit, plus tragiquement, des étoiles jaunes qui se reflètent sur les habits des comédiens. Le duo de metteurs en scène a choisi de se concentrer sur les adolescents et leurs pensées, leurs émois, leurs doutes, laissant percevoir les adultes que par leurs conversations, leurs éclats de voix et leurs disputes. La bande sonore jour un rôle important, ponctuée d’extraits de musique classique mais aussi des bruits venus de la rue, voire des bruits  venus de la fabrique par des employés, et même des cambrioleurs jusqu’au jour fatidique …

— Judith Goudal, Yann Philipona et Laurie Comtesse – Le Journal d’Anne Frank
© Julien James Auzan – Image courtoisie Théâtre de Carouge

Rencontre avec l’un des deux metteurs en scène, Nicolas Rossier, à Carouge.

 

Propos recueillis par Firouz Elisabeth Pillet juste avant le lever du rideau

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Firouz Pillet

Journaliste RP / Journalist (basée/based Genève)

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