La 6e édition du Festival international du film de Duhok au Kurdistan d’Irak (20-27 octobre 2018)
Il est des endroits où, spontanément, on s’étonne qu’une telle manifestation ait ses quartiers, et ceci depuis déjà 6 ans ! La région est certes autonome mais politiquement peu stable comme le montre l’échec il y a un an du référendum pour l’indépendance – qui a engendré de graves problèmes économiques pour les 3 provinces du Kurdistan autonome – et la récente campagne électorale pour les législatives du parlement du Gouvernorat. Cette région est connue, hors des frontières irakiennes, principalement pour sa force de sécurité, les Peshmergas, qui combattent l’État islamique autoproclamé avec succès et recrutent des milices autonomes, également composées de femmes, des minorités religieuses des Yézidis ou chrétienne de Qaraqosh.
Comme nous pouvons le constater partout et tous les jours, en « Occident » y compris, les premiers espaces attaqués par les idéologies dogmatiques sont ceux de l’expression et de la communication, dont la culture et le journalisme sont les fers de lance. Il est donc réjouissant de savoir qu’un festival reconnu à l’international s’est installé dans cet espace, interroge nos réactions spontanées, se désenclave et se positionne sur la carte du monde en nous ouvrant les portes d’une région tourmentée depuis des siècles, à cheval sur quatre pays – l’Irak, l’Iran, la Syrie et la Turquie.
Œil de caméra féminin
Collant à son époque, le festival de Duhok, à l’instar de nombreux festivals depuis maintenant deux ans avec #metoo mais également les polémiques récurrentes de la place des femmes dans le monde professionnel, veut mettre en avant le travail des femmes dans l’industrie cinématographique.
« Le festival vise à mettre en avant la perspective et l’art féminins sous-représentés dans le cinéma en mettant l’accent sur la narration féminine et en célébrant les films réalisés par des femmes. Chaque section contiendra donc une sélection mondiale de films mettant l’accent sur les femmes au cinéma et sur le cinéma fait par les femmes. »
Les catégories en compétitions honorent les trois genres habituels que sont les films de fiction, les documentaires et les courts métrages et ceci dans les deux catégories : kurde et internationale. Le film qui fait l’ouverture du festival le 20 octobre 2018 est Zagros (2017), premier long-métrage du réalisateur belgo-kurde Sahim Omar Kalifa qui a remporté plusieurs prix et fera à cette occasion sa Première en Irak, film qui au regard du fil rouge du festival est tout à fait à propos puisqu’il dépeint la la lutte d’une femme prise entre la société traditionnelle kurde et la vie occidentale moderne.
Le festival présente également au public des Premières irakiennes de films primés et présentés dans les festivals de catégorie A comme The Square de Ruben Östlund, Palme d’or à Cannes en 2017, L’autre côté de l’espoir (Toivon tuolla puolen) d’ Aki Kaurismäki qui a remporté l’Ours d’argent du meilleur réalisateur à la Berlinale 2017, Aus dem Nichts (In The Fade) de Fatih Akin présenté à Cannes 2017, Insyriated de Philippe Van Leeuw présenté à la Berlinale 2017, Invasion (Hojoom) le film très déroutant mais magistralement mené par l’iranien Shahram Mokri présenté à la Berlinale 2018.
Malik Berkati
[Le rédacteur en chef de j :mag étant membre du jury FIPRESCI (jury de la critique internationale) qui décernera un prix pour le meilleur film dans la section des films kurdes, il n’y aura pas de critiques sur les films en compétition dans le magazine avant la fin du festival.]
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